Ce qu’il s’est passé hier mardi 19 février à Khenchela est grave. Cela montre clairement que les accusations de partialité de l’administration émises par certains candidats au scrutin du 18 avril ne sont pas des paroles en l’air. Le maire FLN de cette grande commune de l’Est du pays a tenté de bloquer la légalisation des signatures de parrainage du candidat indépendant Rachid Nekkaz.
Kamel Hachouf a fermé sa mairie pour, selon des sources proches du FLN, empêcher les partisans de Nekkaz de signer les formulaires de candidature en sa faveur. ‘’Le maire a posté un message sur Facebook et il a fermé la mairie pour empêcher les gens de signer en faveur de Rachid Nekkaz. Il a défié la population. La foule s’est rassemblée devant la mairie obligeant la police à intervenir pour l’ouvrir’’, a affirmé à TSA une source responsable au FLN.
Dans la soirée de la même journée dans une ville d’habitude paisible, l’information tombe : le maire a été suspendu par le wali après les incidents survenus à proximité de la mairie. Le wali de Khenchela a pris sa décision sur la base de l’Article 43 du Code de la commune.
Le comportement de cet élu n’est cependant pas isolé, ni anodin dans le contexte actuel de collecte des signatures de parrainage des candidats à la candidature de la prochaine présidentielle.
Plusieurs postulants ont en effet, depuis le retrait des formulaires de parrainage, dénoncé des « dépassements », des « pressions » et des « entraves » de l’administration lors des opérations de légalisations ou de collecte des signatures de parrainage.
Le 4 février dernier, Mokrane Ait Larbi, directeur de la campagne électorale du candidat Ali Ghediri, dénonçait « les entraves » et les « intimidations » orchestrées par certaines APC. « Au moment où la campagne pour la collecte des signatures de parrainage atteint la vitesse de croisière, certaines APC multiplient les entraves, et parfois les intimidations contre les citoyens qui parrainent le candidat Ali Ghediri », indiquait Mokrane Ait Larbi, qui a « interpellé le ministre de l’Intérieur pour rappeler à l’administration son devoir de neutralité, dans le respect de la Constitution et des lois de la République, et mettre en garde ses agents contre les dérives qui engagent leur responsabilité pénale. »
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Même le RND, victime de « dérives » collatérales
Vendredi dernier à El Eulma, le président du Front Al Moustakbal Abdelaziz Belaid, également candidat à l’élection présidentielle du 18 avril 2019, avait menacé de se retirer de la course de cette présidentielle. « Nous avons constaté beaucoup de dépassements sur le terrain lors de la collecte de signatures. Il y a beaucoup de pression sur nos élus dans la plupart des wilayas. Et, il y a des comportements inacceptables, immoraux », a-t-il déclaré à TSA. Pour lui, « toutes les institutions de la République sont devenues des comités de soutien (au candidat Abdelaziz Bouteflika) et tous les cadres sont mobilisés. » « Si les choses ne changent pas, on se retire ».
« Cette délinquance institutionnelle », selon Mokrane Aït Larbi, a été dénoncée et stigmatisée y compris par le chef d’un des partis de la majorité présidentielle, Ahmed Ouyahia lors des élections partielles pour le renouvellement du Conseil de la Nation. Ahmed Ouyahia avait dénoncé des « dérives » et des « dépassements » lors du déroulement de ce scrutin, fin décembre dernier, dont des pugilats entre militants du FLN et du RND à Oran.
« Des dépassements flagrants ont été enregistrés dans certaines wilayas. Le sentiment d’indignation est dû aussi au recours à la violence vile qu’on a vue dans d’autres wilayas », résume le patron du RND, qui a dénoncé « avec force ces dépassements et ces dérapages, qui ne servent ni la démocratie, ni l’Etat de droit. » Ahmed Ouyahia visait sans le nommer le FLN.
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