« Je prépare un film pour rendre hommage à toutes les femmes qui ont contribué à la Guerre de libération nationale qu’elles soient algériennes ou européennes. Des femmes qui ont été emprisonnées et certaines condamnées à mort. Je vais raconter l’histoire de ces femmes dans un long-métrage », a annoncé le cinéaste algérien Rachid Bouchareb, lors d’une rencontre avec la presse, à l’hôtel Royal, lors du 11e Festival international d’Oran du film arabe (Fiofa), clôturé le mardi 31 juillet. Le cinéaste a entamé le travail de recherche documentaire pour les besoins du film. « Et à partir des mois de novembre-décembre, je vais commencer les repérages. Je vais m’inspirer des histoires de toutes les héroïnes qu’on connait aujourd’hui. J’ai rencontré Zahra Drif et Louisette Ighilahriz. Et parmi les européennes, il y a Jacqueline Guerroudj, Danielle Minne (connue aussi par Djamila Amrane Minne) et Annie Steiner. Je vais écrire une histoire à partir du parcours de ces femmes, mais je me détache complètement de la vraie Histoire. Cela va être toutefois un engagement sur ce sujet. Cela m’intéresse de rendre hommage à ces femmes à travers le cinéma », a expliqué Rachid Bouchareb.
« Je n’écris pas l’Histoire »
Parlant du rapport du cinéma à l’Histoire, le cinéaste est revenu sur la polémique, soulevée en 2010, par son film « Hors la loi , sélectionné au Festival de Cannes et retenu pour représenter l’Algérie aux Oscars de 2011. « À Cannes, on m’a dit que l’histoire de Sétif (massacres du 8 mai 1945), ce n’était pas vraie et qu’on avait tué une femme et un enfant. Il y a eu le débat sur qui a tiré le premier. Il y a l’Histoire qu’il faut l’écrire. Cela prendra peut être un siècle. Dans mon film, je ne raconte pas les détails, c’est l’affaire des historiens. Je n’écris pas l’Histoire. Je voulais parler des événements de Sétif et des Algériens qui se sont engagés en France (pour la Guerre de libération nationale). J’ai vu les rafles de la police dans les quartiers en France lors que j’étais enfant. Même ma mère a été embarquée », a-t-il dit. Il a également parlé de son long-métrage, « Indigène » qui racontait l’histoire des tirailleurs algériens, ces unités de l’armée de terre française créées en 1842 qui ont participé notamment à la Première guerre mondiale et à la campagne d’Italie (lors de la Seconde guerre mondiale). « Quand j’ai réalisé le film « Indigène » en 2006, il n’y avait rien d’écrit sur le sujet. Je suis allé voir des personnes qui sont encore vivantes et qui m’ont raconté leur guerre à elles. J’ai choisi d’avoir six tirailleurs algériens au lieu de 1000 dans le film. Cela m’a suffit pour raconter l’histoire », a-t-il dit. « Indigène » a été sélectionné au festival de Cannes.
« Mon prochain film sera tourné en Algérie »
Rachid Bouchareb a annoncé qu’il ne reviendra pas tourner en France. « Pour l’instant, je n’ai pas trop d’idées. Ce n’est pas d’actualité. Mon prochain film sera tourné en Algérie, peut être, celui d’après encore. Et puis, après, il faudra que je m’arrête et passer à autre chose. Je trouve que j’ai fait suffisamment de films », a-t-il déclaré. Critiqué et attaqué après la sortie de son film « Hors la loi », en raison de l’évocation des massacres du 8 mai 1945 et du 17 octobre 1961, Rachid Bouchareb a tourné ces derniers films et télélfims, «Ennemy way », « Just like a woman » et « La route d’Istanbul », en dehors de la France, aux États-Unis et en Turquie notamment. Le cinéaste, âgé de 65 ans, n’a pas caché sa volonté de se retirer. « Oui, je vais m’arrêter dans un proche avenir et passer à autre chose. J’ai fait suffisamment de films. Ce que j’ai envie de faire, c’est de rencontrer de jeunes cinéastes algériens, m’investir un peu là, partager avec eux mon expérience. Je vais essayer de leur apporter quelque chose. Je trouve enthousiasmant d’être sollicité par de jeunes cinéastes, ça sera ma reconversion », a-t-il annoncé. Rachid Bouchareb, qui a réalisé une quinzaine de films et téléfilms depuis 1982, n’ouvrira pas d’école de formation cinématographique. « Quand j’aurais fini de faire mes films, Je vais rencontrer au feeling ces jeunes pour évoquer mon expérience au cinéma. Pour réussir, il faut avoir du talent et un sujet à raconter. C’est mon conseil », a-t-il conclu.