En Sicile, l’annonce de la vente de la raffinerie d’Augusta par Esso Italiana à la Sonatrach suscite toujours de vives inquiétudes sur le plan écologique. Si la municipalité d’Augusta n’a pas donné suite à notre demande d’interview, nous nous sommes entretenus avec Enzo Parisi, représentant de l’association environnementale Legambiente pour la région de Syracuse.
Un programme de dépollution des sols existe sur le site de la raffinerie d’Augusta. Pourtant, à date seuls 10% des sols ont été dépollués. Pourquoi ce plan accuse-t-il autant de retard ?
En Italie, la loi qui réglemente la question de la remise en état des sols date de 1998. Elle prévoit que certaines zones industrielles italiennes (et notamment celles de « Priolo » en Sicile qui comprend les villes d’Augusta, Priolo, Melilli et Syracuse) sont considérées comme des « sites d’intérêt national à des fins de remise en état » appelés « SIN ». Ils sont identifiés en fonction des caractéristiques du site, des quantités et des dangers des polluants présents et des risques sanitaires et écologiques.
Conformément à la loi, les entreprises, afin d’éviter les sanctions pénales, doivent signaler aux autorités la pollution des sols et/ou des eaux causée par leurs activités. Elles se déclarent ainsi responsables et contraintes d’assurer la dépollution des sites concernés en respectant un plan (analyse détaillée des sols et des eaux pour déterminer le type et l’ampleur de la pollution, mesures pour prévenir la propagation de la contamination, projets de remise en état).
La zone industrielle de Priolo s’étend sur 5814 hectares. Seulement 449 hectares ont été décontaminés au 31 décembre 2017, soit environ 8% des sols et des eaux souterraines…
Plusieurs raisons peuvent expliquer la non-application du plan de dépollution : nombre élevé de sites identifiés comme « SIN » par le ministère de l’Environnement (57), complications juridiques, difficultés techniques, petit effectif de fonctionnaires travaillant sur ces questions, et – je n’exclus pas – la faible volonté politique d’accélérer sur le sujet de la remise en état et de l’assainissement des terres.
Cette problématique des sites industriels ne concerne toutefois pas seulement l’Italie mais toute l’Europe puisque les zones contaminées se comptent par milliers.
À qui revient la responsabilité aujourd’hui de poursuivre ce programme de dépollution ? À Esso ? Ou au nouvel acquéreur, la Sonatrach ?
Esso reste responsable de la dépollution sur le plan du droit pénal et du droit administratif. Quant au volet de droit civil, il est possible de conclure des accords (par exemple Esso peut confier à d’autres, y compris à Sonatrach, la conception et l’exécution des travaux) mais celui qui a causé la pollution reste responsable.
Sonatrach aura les mêmes obligations que toutes les autres entreprises italiennes et étrangères opérant en Italie et en Europe. En d’autres termes, elle doit respecter les réglementations contractuelles et syndicales, celles relatives à la sécurité des travailleurs et à la protection de l’environnement.
Le site d’Esso cédé à la Sonatrach n’est pas le seul concerné par la pollution massive (sols et nappes d’eau souterraine contaminés aux hydrocarbures et aux métaux lourds). Cela fait des années que l’on évoque régulièrement les nombreux cas de cancers ou de malformations chez les enfants dans la région liés à la pollution engendrée par le complexe pétrochimique de Syracuse…
La pollution est certainement massive et concerne l’ensemble du complexe industriel qui s’étend le long de la côte d’Augusta à Syracuse. En ce qui concerne la raffinerie d’Augusta appartenant à Esso, qui a une superficie d’environ 280 hectares, je ne peux pas vous dire exactement la taille des zones contaminées, et combien d’entre elles ont été décontaminées ou sont sur le point d’être.
Cette zone, comme malheureusement beaucoup d’autres dans le monde, subit les conséquences des activités industrielles qui ont sérieusement contaminé notre environnement et causé des dommages à notre santé.
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