Société

Rapatriement des dépouilles d’Algériens : un engagement de Tebboune remis en cause

L’Algérie a décidé de revoir sa politique en matière de prise en charge du rapatriement des dépouilles de ses ressortissants qui décèdent à l’étranger.

Le député de l’émigration Nourredine Belmeddah a fait état vendredi d’un recul de la part du gouvernement sur l’engagement de l’État à prendre en charge les frais de rapatriement des dépouilles des Algériens décédés à l’étranger.

Il explique que le gouvernement a fait machine arrière sur une disposition de la Foi de Finances complémentaire (LFC) pour 2020, qui a institué un « Fonds de solidarité pour les ressortissants algériens décédés à l’étranger ».

Mais le gouvernement a décidé changer en revenant aux dispositions de l’article 92 de la loi de finances pour 2016 disposant que l’État prend en charge les frais de rapatriement vers l’Algérie des corps des « personnes nécessiteuses » parmi la communauté algérienne établie à l’étranger.

Un revirement qui ne plait pas au député Belmeddah pourtant à l’origine de cet article. En 2014, alors qu’il était député du FLN à l’APN, Noureddine Belmeddah avait réussi grâce au soutien de ses collègues à faire passer un article dans la loi de finance 2015 engageant l’État à prendre en charge les frais de rapatriement de tous les Algériens décédés à l’étranger.

« À l’époque, je n’avais pas précisé si la prise en charge devait toucher uniquement les personnes démunies ou les nanties. En ce sens que ce sont les textes d’application qui devaient préciser quelle catégorie pouvait bénéficier de cette prise en charge », raconte à TSA le député Belmeddah.

« Le vote de l’article en question était une première après que la commission des finances de l’APN l’avait refusé au même titre que les groupes parlementaires et le gouvernement », se souvient le parlementaire.

Cette disposition de loi n’avait pas été mise en application en raison du retard dans la publication des textes d’application. En octobre 2015, une audience a été accordée au député Belmeddah par l’ancien Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui a demandé le parlementaire à modifier son article en précisant que la prise en charge ne toucherait que les personnes qui étaient démunies, avant leur décès.

C’est à cette condition que l’ancien Premier ministre avait certifié au parlementaire qu’il allait libérer les textes d’application pour que la mesure entre en vigueur.

L’article a été modifié et voté lors de la loi de Finances 2016 et les textes d’application ont suivi quatre mois après la publication de cette loi, en avril de la même année.

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La pris en charge des frais de rapatriement limitée aux démunis

« Les frais de rapatriement des Algériens démunis décédés à l’étranger sont pris en charge par l’État, et aucun d’eux ne devait rester à la morgue au-delà d’une période d’un mois », rappelle Belmeddah.

« La mesure était restée en vigueur jusqu’à l’élection du président Abdelmadjid Tebboune qui a promis de prendre en charge par l’État des frais de rapatriement de « tous les Algériens décédés à l’étranger », ajoute Belmeddah.

Le parlementaire précise qu’il avait proposé solution intermédiaire consistant en la création d’une caisse spéciale pour le rapatriement des dépouilles des Algériens décédés à l’étranger dont les recettes proviendraient d’un paiement symbolique (entre 2 et 5 euros) des frais de la « carte consulaire » jusque-là délivrée gratuitement.

Selon le promoteur de cette disposition, l’argent ainsi récolté pouvait couvrir les frais de rapatriement au lieu et place de l’État. « Cet article que j’ai fait passer en novembre 2016 sans difficulté puisque le gouvernement l’avait accepté, de même que la commission des finances et la majorité des députés, a été publié au Journal officiel. Depuis son adoption, les textes d’application ne sont toujours pas publiés », regrette Belmeddah.

« Pourtant c’est la meilleure solution », d’autant que, relève-t-il, l’État algérien n’avait rien à débourser. « Le président Tebboune a réitéré à l’occasion de son discours d’investiture sa promesse que l’État prendra en charge les frais de rapatriement pour tous les Algériens décédés à l’étranger sans exception », se souvient le député.

« Jusqu’au mois de mai 2020, l’article de la Loi finances pour 2016 qui spécifie les personnes nécessiteuses continuait à être appliquée. Jusqu’à ce que le gouvernement mette en application la promesse du chef de l’État de n’exclure personne de la prise en charge du rapatriement. Suite à quoi, la disposition de 2016 a été gelée. Par la suite, dans la préparation de la loi de finance 2021, le gouvernement a apporté une nouvelle disposition annulant la promesse du chef de l’État, et actant un retour à la disposition de 2016 relative aux personnes nécessiteuses », relate le député.

« Le gouvernement n’a appliqué la promesse du chef de l’État que durant sept mois, de mai à décembre 2020 », remarque M. Belmeddah.

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