La classe politique ne veut pas de l’élection du 4 juillet que le pouvoir a tenté jusque-là d’imposer coûte que coûte. Alors que le délai de dépôt des candidatures expire cette semaine, plusieurs acteurs politiques se sont exprimés pour réitérer leur refus d’aller aux urnes dans la conjoncture actuelle.
Dans un communiqué commun, Ali Yahia Abdenour, Ahmed Taleb Ibrahimi et le général à la retraite Rachid Benyelles ont appelé, ce samedi 18 mai, au report de la présidentielle. « La situation de blocage à laquelle nous assistons par le maintien de la date du 4 juillet (élection présidentielle) ne pourra que retarder l’avènement inéluctable d’une nouvelle République. Car comment peut-on imaginer des élections libres et honnêtes alors qu’elles sont d’ores et déjà rejetées par l’immense majorité de la population parce qu’organisées par des institutions encore aux mains de forces disqualifiées, opposées à tout changement salutaire ? », écrivent-ils. Les trois personnalités plaident en faveur d’une période de transition.
Le FFS et le RCD ont rappelé, ce samedi, leur rejet de la présidentielle du 4 juillet, appelant à son report. « La question n’est pas de savoir si l’échéance électorale du 4 juillet va échouer mais de prévenir les coûts de son échec », a estimé mercredi Saïd Sadi, ancien président du RCD. Ali Benflis porte presque le même jugement sur l’échéance. « Les élections présidentielles, programmée pour le 4 juillet prochain, sont politiquement inopportunes, matériellement irréalisables et foncièrement hasardeuses », écrit l’ancien chef de gouvernement.
Avant eux, un autre ancien chef de gouvernement, Ahmed Benbitour, a mis en garde en début de semaine contre « la catastrophe » vers laquelle sera mené le pays si le scrutin est maintenu. « Si on reste dans la perspective d’élection le 4 juillet, c’est fatalement une désignation et non pas des élections », a-t-il analysé sur les ondes de la radio nationale.
Jamais une échéance politique n’a fait une telle unanimité contre elle. Même certaines formations politiques qui ont jusque-là applaudi toutes les initiatives du régime ne voient pas d’un bon œil sa tenue dans les conditions actuelles. Seuls les tenants du pouvoir y tiennent, contre tout bon sens faut-il le dire. Car rien, sur le terrain, ne plaide pour aller aux urnes.
Deux éléments sont en principe suffisants pour amener le pouvoir à chercher une autre voie de sortie de crise : l’absence de candidats pour la présidentielle et son rejet quasi unanime par la population à travers les marches hebdomadaires.
Parallèlement à cette défiance de la classe politique, la rue en fait même une constance : chaque vendredi, le rejet de l’élection sous l’égide des institutions et des responsables actuels est exprimé avec quasiment les mêmes slogans aux quatre coins du pays. Cela s’est encore confirmé de manière forte hier vendredi 17 mai. Le rejet de la présidentielle du 4 juillet était l’un des thèmes les plus fédérateurs des marches populaires.
Les ministres du gouvernement ne peuvent pas sortir sur le terrain sans créer l’émeute et, pour ne rien arranger, maires et magistrats menacent de ne pas organiser ou superviser le scrutin. Il ne reste qu’un aveu d’échec formel du pouvoir pour que l’élection du 4 juillet tombe définitivement à l’eau. Cela devrait survenir dès cette semaine avec la constatation de l’absence effective de candidats.
Il serait alors temps pour l’état-major de l’ANP d’écouter les nombreuses initiatives qui constituent autant de propositions pour une transition démocratique pacifique. D’autant plus que, comme le souligne Saïd Sadi, « à quelques détails près, les organes et mécanismes dédiés à la transition font largement consensus ».