Nommé ministre de l’Énergie dans le gouvernement Djerad II, Abdelmadjid Attar a pris ses nouvelles fonctions ce mercredi 25 juin. « L’économie nationale doit oublier la rente énergétique et doit travailler sur la production de nouvelles richesses à moyen terme », a affirmé l’ancien PDG de Sonatrach lors de la cérémonie d’installation.
Ces propos résument les nouvelles ambitions de l’Exécutif : relancer l’économie sans miser sur une remontée des cours du pétrole. Cela fait six ans que la crise pétrolière dure et peu d’experts parient sur un retour des prix aux niveaux d’avant 2019. L’Algérie doit aussi faire face à une baisse de sa production et une concurrence farouche sur les marchés pétroliers et gaziers.
La mission de Attar
Abdelmadjid Attar doit aussi stabiliser un secteur en proie à une crise depuis 2010, avec des changements fréquents à la tête de Sonatrach. Le choix d’Abdelmadjid Attar comme ministre « n’est pas fortuit », expliquent nos sources. Ancien PDG de Sonatrach, l’homme connaît parfaitement ce secteur.
Au sein du gouvernement, sa mission s’articule autour de deux grands axes. Le premier est de « passer à une phase de revalorisation des ressources et au développement des dérivés pétroliers ». Le second est de permettre à l’Algérie de « maintenir son statut dans le marché pétrolier et gazier », dans un contexte de forte concurrence sur les marchés pétrolier et gazier, sur fond de forte baisse des prix de l’or noir.
Outre l’arrivée d’un spécialiste reconnu à la tête de l’Énergie, ce remaniement a permis au professeur Chamseddine Chitour, qui était à l’Enseignement supérieur, de retrouver un secteur qu’il connait : la transition énergétique et les énergies renouvelables. L’Algérie vient de relancer les discussions avec la partie en charge de l’initiative allemande « Desertec » pour le lancement des projets de centrales solaires.
Des ministères en relation avec l’économie
Hier, le remaniement a touché plusieurs ministères. Mais les changements les plus importants sont en lien direct avec l’économie et l’investissement : l’Énergie, les Finances, l’Agriculture et le Tourisme.
Après six mois de travail, dont trois consacrés à la lutte contre la pandémie de coronavirus Covid-19, le président Tebboune veut passer à une « autre étape », celle de la « concrétisation des objectifs tracés », expliquent nos sources.
Le remaniement ne signifie pas l’échec du gouvernement Djerad I, assurent encore nos sources, en soulignant qu’il a été fait appel à des « hommes d’expérience » pour former le nouvel Exécutif.
« Dans le premier gouvernement, formé par des personnes crédibles propres et honnêtes dans l’esprit du Hirak, il y a des hirakistes », rappellent-elles, soulignant que l’économie demeure la « priorité » du chef de l’État.
« Diplomatie économique » et numérisation
Même les ministres qui n’ont pas été touchés par le remaniement seront appelés à participer à la relance de l’économie. C’est notamment le cas du ministre des Affaires étrangères. Sabri Boukadoum est maintenu, avec une mission supplémentaire, qui est celle de la « diplomatie économique ».
Autre nouveauté : la création d’un ministère dédié à la Numérisation et des Statistiques et confié à Mounir Khaled Berrah, dont la mission principale est de numériser tous les secteurs.
« C’est l’un des engagements du président. Il va s’occuper de la numérisation de tous les secteurs et de la mise en place du e-gouvernement », expliquent nos sources, qui soulignent que « certains secteurs clés sont restés au stade du papier pour différentes raisons, pour certaines malveillantes ».
Outre la numérisation, ce département va s’occuper aussi des statistiques. Comme dans la numérisation, M. Berrah doit commencer de zéro dans un pays où les statistiques fiables font défaut. « On ne peut pas développer un pays sans statistiques fiables. Il faut savoir qu’aucun secteur n’a de véritables statistiques. Les chiffres diffèrent d’un gouvernement à un autre, voire d’un responsable à un autre. C’est avec des chiffres vérifiés qu’on peut élaborer des stratégies économiques », développent nos sources, en affirmant que les statistiques sont « le talon d’Achille » de l’économie algérienne.
Travaux publics et Transports
Le remaniement ministériel opéré mardi a séparé les Travaux publics des Transports. Chacun des deux secteurs a désormais son ministère dédié. Les deux départements avaient été réunis en juin 2016, lors d’un remaniement ministériel, et confiés à Boudjemaa Talai, actuellement jugé dans l’affaire Ali Haddad. « Ces deux secteurs ont été regroupés par le passé uniquement pour faciliter l’octroi des marchés à certains. Ni les transports, ni les travaux publics n’ont été gérés », rappellent nos sources.
Résultat : les Transports est un secteur à l’agonie. « Il est déstructuré, déplorent nos sources. Une révolution s’impose dans ce secteur ».
La mission principale du ministre des Transports, Lazhar Hani est de « développer le maritime longtemps entre les mains des étrangers, l’aérien en créant un hub et le ferroviaire », détaillent nos sources, en affirmant que le pavillon algérien « doit s’imposer ». Que ce soit dans le transport aérien ou le fret maritime.
Dans le secteur des Travaux publics, la situation est également calamiteuse. « Tout le monde connaît ce qui s’est passé dans ce secteur », rappellent nos sources, en allusion aux scandales qui ont éclaté autour de l’octroi des marchés. Trois anciens ministres des Travaux publics sous Bouteflika sont poursuivis actuellement en justice dans des affaires liées à la corruption. Il s’agit de Amar Ghoul, Boudjemaa Talai et Abdelghani Zaalane.
« On doit désenclaver des régions, entretenir les autoroutes, relancer les projets du grand port du Centre, et la voie ferrée vers les Hauts-Plateaux et le sud », résument-elles
L’Algérie veut exporter des médicaments
Autre nouveauté : la promotion de Lotfi Benbahmed au poste de ministre de l’Industrie pharmaceutique. Il était ministre délégué en charge du même secteur dans le gouvernement Djerad I. L’Algérie « a les moyens de devenir un acteur majeur dans ce secteur », assurent nos sources.
« La création de ce ministère doit permettre à l’industrie pharmaceutique de se développer davantage. C’est un secteur à très haute valeur ajoutée et un gisement d’emplois. Il doit être un des leviers de croissance de l’économie », soutiennent-elles.
Dans la PME/PMI, il s’agit de « créer d’ici la fin de l’année un nombre considérable de petites entreprises. Ce ministère doit encourager la création d’entreprises pour un nouveau départ de l’économie ».