Des incendies sans précédent ont ravagé des milliers d’hectares de forêts dans la wilaya de Khenchela durant la première semaine du mois de juillet.
Des centaines de jeunes venus de toutes les régions voisines se sont mobilisés pour prêter main forte aux sapeurs-pompiers et garde-forestiers, vite dépassés par l’ampleur de cette catastrophe écologique.
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Armés de moyens du bord : pelles, pioches, bidons d’eau, ces jeunes héros n’ont pas hésité à mettre leur vie en péril afin d’essayer de sauver des flammes le massif végétal et les vergers de pommes de cette région des Aurès.
Plus de 2.600 hectares de couvert végétal ont été réduits en cendre. Parmi ces convois de volontaires, un photographe amateur a tenu a immortalisé ces instants, en prenant en photos les jeunes chaouis qui ont combattu avec héroïsme le feu.
Son nom : Djalel Marzoug. Ses photos, partagées sur les réseaux sociaux, ont été vues et largement partagées. Par ce geste, ce photographe autodidacte (25 ans) a voulu lancer un message fort. Les jeunes Algériens n’hésitent pas à se mobiliser, et à faire preuve d’entraide et de solidarité face à un danger commun.
C’est sa manière de rendre hommage à ces jeunes chaouis volontaires qui se sont levés comme un seul homme, bravant les flammes de ces incendies ravageurs qui ont décimé des hectares de forêts.
Djalal Merzoug nous raconte dans quelles conditions ces magnifiques photos ont été prises.
Djalal Merzoug, qui êtes-vous ?
J’habite Oum El Bouaghi. J’ai 25 ans. Je suis titulaire d’un Master 2 en sciences politiques que j’ai obtenu il y a deux ans à l’université Larbi Ben M’hidi de Oum El Bouaghi.
Je suis actuellement au chômage. Je me passionne pour la photographie que je pratique en amateur depuis plusieurs années.
Pourquoi avez-vous décidé de rejoindre le groupe des volontaires qui ont combattu les foyers d’incendies de Khenchela ?
Dès que la nouvelle de ces incendies s’est propagée, les habitants d’Oum El Bouaghi à l’instar des villes limitrophes se sont mobilisés. Chacun a apporté son aide.
Certains ont fourni de l’argent. D’autres de la nourriture et des boissons. Il faut savoir que « Djebel Feraoun » dans la région de Ain Mimoun est connu pour ses arbres rares qu’on trouve aussi au Liban.
Par amour pour notre région et afin de sauver cette faune, nous ne pouvions pas rester indifférents. J’ai formé un groupe de volontaires et nous avons pris le départ depuis Oum El Bouaghi via cette caravane de la solidarité.
J’ai décidé de participer à ma façon à cette action citoyenne, en photographiant ces jeunes « soldats du feu improvisés ». Ils étaient des centaines et affluaient de partout : Batna, Tébessa, Khenchela, M’sila…
Comment avez-vous rejoint les régions touchées par les incendies ?
Il fallait marcher plusieurs heures pour atteindre les endroits du sinistre. Certains volontaires n’ont pas supporté à cause de la chaleur. Nous étions en pleine fournaise. À la canicule s’ajoutait l’enfer du feu. C’était une situation apocalyptique.
Vous avez immortalisé avec votre appareil photo cette mobilisation citoyenne pour éteindre les feux. Dans quelles conditions avez-vous pris ces photos ?
Je suis resté deux jours sur place. Nous avons dressé des tentes et avons passé la nuit. Je ne voulais pas que ces jeunes volontaires qui combattaient le feu jour et nuit, viennent poser devant mon objectif.
Je les ai pris à leur insu. Et c’est ce côté naturel, à mon avis, qui a plu aux internautes. J’en ai posté quelques-unes sur Facebook et Instagram.
J’étais loin d’imaginer qu’elles allaient faire le buzz. Certains ont cru qu’il s’agissait d’acteurs de cinéma hollywoodiens. Ça m’a fait beaucoup rire. Ces jeunes ne jouaient pas dans un film. C’était la réalité. Leur courage et leur mobilisation étaient juste magnifiques.
Quel message vouliez-vous transmettre en partageant ces photos ?
Qu’on arrête de blâmer les jeunes en les traitant de tous les maux. La jeunesse algérienne est consciente, civilisée et responsable. Elle est nationaliste et aime son pays.
Ces jeunes l’ont démontré encore une fois. Ils n’ont pas hésité à braver le feu, au péril de leur vie, pour essayer de sauver ces massifs forestiers et ces vergers de pommes dont de nombreux agriculteurs de Bouhmama tirent leur subsistance.
C’est cela la solidarité. Et pourtant ces jeunes souffrent tous du chômage. Qu’ils soient diplômés ou non, ils n’arrivent pas à trouver un emploi.
C’est également mon cas. Les jeunes de Khenchela et des environs n’aspirent qu’à trouver du travail et vivre en paix dans leurs pays. C’est ce message qu’ils m’ont demandé de transmettre.
Quel avenir pour ces photos ?
La maison de la culture de Khenchela organise bientôt une exposition avec des artistes. J’ai été convié à y participer avec cette galerie de photos -portraits afin de rendre hommage à ces jeunes « soldats du feu » des Aurès.