Plus de cinq millions d’élèves du primaire ont repris le chemin de l’école ce mercredi 21 octobre en Algérie, après un arrêt exceptionnel de plus de sept mois, en raison de la pandémie de coronavirus, qui a imposé la fermeture des établissements scolaires.
Pour marquer l’évènement, le premier ministre Abdelaziz Djerad s’est déplacé à Batna, et s’est rendu dans l’école primaire où il a entamé son parcours scolaire, pour lancer officiellement et solennellement la rentrée scolaire.
Sur place, le premier ministre a annoncé que toutes les écoles du pays seront dotées de tablettes pour permettre aux élèves de les utiliser dans leur apprentissage.
Offrir aux élèves des moyens didactiques modernes est sans doute une très louable initiative, comme l’est cette décision prise dans la même wilaya de faire porter à tous les élève une tenue uniforme pour, explique-t-on, lutter contre « les disparités sociales ».
Sauf que les disparités, il y en a à foison dans l’institution éducative, entre les écoles et les moyens (transport, mobilier, cantines…) mis à la disposition des élèves et des enseignants d’une région à une autre, parfois même entre les établissements d’une même zone géographique. C’est peut-être par là qu’il fallait commencer.
Au moment où des écoles faisaient un saut dans « la modernité » sous les yeux du Premier ministre, d’autres établissements étalaient leur retard et leur délabrement à l’occasion de visites de responsables locaux, à la même occasion.
Une vidéo tournée dans une école primaire d’Oran fait particulièrement le buzz en ce premier jour de rentrée scolaire. Elle montre des salles dans un piteux état et des pupitres desquels il ne reste presque rien.
L’enseignante qui a tenu à faire visiter les lieux à des journalistes en a eu pour ses frais quand elle a courageusement signalé la situation au wali. Alors qu’il est attendu de lui au moins une promesse d’y remédier, le responsable a préféré retourner sur ses talons sans le moindre égard pour son interlocutrice.
Le tout devant les caméras. Il n’a apparemment pas apprécié que l’enseignante lui dise que les pupitres de l’école dataient de « l’époque coloniale ».
Les tables ne sont peut-être pas aussi vieilles que ça, mais leur délabrement saute aux yeux et le wali a tout vu. Rien ne semble avoir dérangé le wali que la description faite par l’enseignante des pupitres de l’école.
Dans une déclaration à la presse immédiatement après, la dame en a remis une couche. « Ce sont les enseignants qui nettoient les salles de classe après les cours », dénonce-t-elle, tout en révélant que lors de sa discussion avec le responsable, son protocole lui intimait l’ordre de se taire.
La scène a donné lieu à un immense élan de solidarité avec l’enseignante sur les réseaux sociaux et soulève de nouveau la question de la gestion logistique des établissements scolaires (confiée au ministère de l’Intérieur à travers les APC, tandis que l’aspect pédagogique relève du ministère de l’Éducation).
Elle rappelle surtout une triste réalité, à savoir que beaucoup d’écoles aux quatre coins du pays se trouvent dans un état inacceptable. Le cas de cette école d’Oran est assez représentatif.
Tout au long de l’année, des images sont régulièrement partagées pour dénoncer les conditions de transport des élèves dans certaines régions, la frugalité des repas dans les cantines scolaires, la surcharge des classes, l’insalubrité, l’insécurité aux alentours de certaines écoles…
Il est vrai que des efforts ont été faits, que l’Algérie consacre une part importante de son budget au secteur de l’Éducation et que certains établissements sont dotés de toutes les commodités et des moyens didactiques les plus modernes.
Il est vrai aussi que l’action de l’État est déterminée par les limites de ses moyens. Les disparités sont néanmoins indéniables et, dans certains cas, elles se creusent davantage d’année en année. Les atténuer, pour ne pas espérer leur anéantissement dans l’immédiat, est possible par un meilleur planning et une meilleure définition des priorités.