Les élèves algériens ont repris le chemin de l’école ce mardi 21 septembre, soit deux semaines après la date initiale de la rentrée scolaire 2021-2022.
Ce report a été décidé officiellement en raison de la situation sanitaire liée au covid-19 et pour donner plus de temps aux personnels de l’éducation pour se faire vacciner.
C’est le ministre de l’Éducation nationale Abdelhakim Belabed qui a donné le coup d’envoi de la nouvelle année scolaire à partir de l’école primaire “Abraz Mohamed” dans la commune de Mohammadia (Alger).
Il s’est rendu dans une classe ultramoderne : tableau digital, tablettes connectés à Internet pour les élèves à la place des cahiers et un seul écolier par table. Le mobilier de cette classe semble neuf. Cela tranche radicalement avec les vraies classes des écoles dépourvues de tout.
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Le coup d’envoi bling-bling de Belabed fait grincer des dents parmi les syndicats de l’Éducation nationale qui se plaignent de manque d’eau, de problèmes d’accès à Internet, de la surcharge des classes…
« On est incapable d’assurer le minimum et on nous parle d’école numérique », tacle le SG du Satef, qui rappelle que l’idée de doter chaque élève d’une tablette a été évoquée par les différents ministres qui se sont succédé à la tête du secteur de l’Éducation.
« Nous ne sommes pas contre cette idée. Bien au contraire. La question qui se pose : est-ce que c’est réalisable ? », se demande Boualem Amoura. La réponse est pour lui évidente : « Nous sommes loin de cette école numérique ».
Pour appuyer son constat, M. Amoura signale que des écoles manquent de lignes téléphoniques ce qui automatiquement les prive de connexion à Internet.
« Les écoles primaires sont gérées par les APC qui elles-mêmes sont déficitaires », témoigne cet ancien élu. Et quand bien même l’idée de basculer vers un « enseignement 2.0 » pouvait être concrétisée, quelles en seraient les conséquences sur les parents ?
« Un père de famille qui a trois enfants scolarisés ne peut se permettre d’acheter à chacun d’eux une tablette alors que son pouvoir d’achat ne le lui permet pas », tempête Amoura.
Les nouvelles réformes de l’enseignement mises en cause
« L’école numérique est une ambition qui ne doit pas toucher au principe de l’égalité des chances. Elle ne doit pas donner lieu à des iniquités sociales » en matière d’accès par les élèves aux outils numériques, estime Messaoud Boudiba, coordinateur et porte-parole du Cnapest.
Le pédagogue relève que le chemin vers l’ « école numérique » doit être précédé d’une préparation et pour qu’elle soit appliquée effectivement, elle se doit d’être généralisée à tous les établissements scolaires algériens.
Les écueils sont, selon Boudiba, surtout d’ordre logistique et financier. Il y a aussi l’élément humain qui suppose que les enseignants soient formés à ces nouvelles techniques d’enseignement via tablettes et tableaux digitaux.
Derrière la mise en avant de la numérisation de l’école c’est le problème de la surcharge des cartables qui est posé. Mais pour le syndicaliste, cette problématique est étroitement liée au contenu du programme scolaire algérien.
« La surcharge du cartable se pose depuis 2003 et le changement des programmes. Le problème n’existait pas avant cette date. En tout cas pas tel que nous le connaissons aujourd’hui », pointe M. Boudiba qui met en cause les nouvelles réformes de l’éducation nationale.
Pour lui, la solution à la surcharge des cartables passe inévitablement par une « révision totale » des programmes d’enseignement. « En premier lieu, en matière de contenus et le nombre de matières à enseigner. Pourquoi 10 matières d’enseignement sachant qu’il faut un livre pour chaque matière ? », s’interroge Messaoud Boudiba.
« Dans le cycle primaire, on n’a pas besoin d’autant de matières d’enseignement et de volume d’informations qu’on a actuellement », souligne le pédagogue qui appelle à se fixer des objectifs clairs.
La surcharge des classes est un problème qui s’est posé par le passé et qui va continuer à se poser tant que les pouvoirs publics n’auront pas ouvert de nouveaux postes budgétaires, prévient le coordinateur du Cnapest. Selon lui, le corps enseignant subit cette surcharge du volume alors que la possibilité d’ouvrir la porte aux recrutements peut régler cette question.