Les étudiants n’ont pas laissé passer leur journée nationale sans faire une autre démonstration de force. Ce dimanche 19 mai, ils ont fait vibrer les campus et marché de nouveau en masse contre le système à Alger et dans d’autres villes du pays.
Dans la capitale, ils étaient des milliers, comme chaque semaine, à la différence que cette fois ce n’est pas un mardi qu’ils ont choisi d’investir la rue. Leur objectif est cependant le même : maintenir la flamme de la contestation entre les grandes marches de vendredi et faire retrouver à l’université son rôle d’avant-garde des luttes politiques. Jusque-là, ils se sont admirablement comportés et la plus-value apportée au mouvement est indéniable.
Hirak oblige, ils ont célébré cette année la journée de l’étudiant comme ils ne l’ont jamais fait auparavant, soulignant sur leurs banderoles et par des slogans criés en chœur que leur combat ne diffère pas avec celui de leurs aînés qui, le 19 mai 1956, avaient déserté les bancs des amphis pour rejoindre la révolution du peuple. Cet objectif, lit-on sur une pancarte brandie par un étudiant à Alger, c’est « l’indépendance et la liberté ».
La fête est réussie et elle aurait pu être totale sans cette tendance qu’a la police à réprimer les manifestants dès lors qu’ils ne sont pas trop nombreux. Ce dimanche au centre d’Alger, il y a eu d’abord la résurgence de cette histoire de parvis de la Grande Poste qu’on veut interdire aux manifestants à cause d’une mise en garde de la wilaya d’Alger sur un supposé danger d’effondrement. Contrairement aux manifestants de vendredi dernier, beaucoup plus nombreux, qui avaient reconquis l’espace à la force des jarrets, les étudiants ont tenté de changer de destination lorsque la police leur a barré l’accès du parvis. Hélas, ils n’auront pas plus de succès lorsqu’ils tenteront de rejoindre le siège du Parlement : partout, ils trouveront sur leur chemin des cordons de CRS à bout de nerfs et prêts à en découdre.
Cette répression constitue un comportement condamnable et incompréhensible vis-à-vis de l’élite du pays. D’autant plus que ce n’est pas la première fois depuis le début du mouvement populaire que les forces de l’ordre ont dans le viseur cette corporation. Le 17 avril dernier, au lendemain d’une journée de répression de la marche hebdomadaire des étudiants, des hommes armés, en civil et à bord de véhicules banalisés, sont entrés dans l’enceinte de la fac de droit d’Alger à la recherche d’étudiants impliqués dans le mouvement. On ne sait toujours pas qui de la BRI (police) ou de la sécurité de l’armée a commis cette violation de la franchise universitaire.
Pourquoi cet acharnement sur les étudiants ? Cette répression signifie-t-elle que le pouvoir n’a pas désespéré de tordre le coup à la contestation par la manière forte ? Si tel est son calcul, autant dire qu’il fait fausse route. Déjà, il est évident que la matraque ou le canon à eau ne serviront pas à grand-chose quand ceux qu’il faudra réprimer seront des centaines de milliers dans la rue. Ensuite, pour ceux qui pourraient croire qu’en s’en prenant aux étudiants ils s’attaquent au cœur battant du mouvement, c’est aussi l’assurance de se gourer lourdement : la révolution est portée par toutes les franges du peuple, toutes les corporations avec la même hargne.
Réprimer les étudiants ne fera que renforcer leur détermination et même s’ils sont empêchés de marcher en semaine, ils pourront toujours le faire le week-end avec le reste du peuple. Et les marches de vendredi ne seront que plus imposantes…
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