Les relations entre l’Algérie et l’Espagne traversent une zone de fortes turbulences. Contre toute attente, la crise entre les deux pays a éclaté après le revirement radical de Madrid sur la question du Sahara occidental.
Le 18 mars dernier, le cabinet royal du roi du Maroc Mohamed VI a annoncé que l’Espagne soutient le plan d’autonomie marocain du Sahara occidental. En mettant fin ainsi à 47 ans de neutralité dans ce conflit, l’Espagne a provoqué la colère de l’Algérie, principal soutien de la lutte du peuple sahraoui pour son autodétermination.
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Le lendemain de cette annonce, le 19 mars, l’Algérie a annoncé avoir rappelé son ambassadeur à Madrid pour consultations, avec effet immédiat. Un mois après, le diplomate algérien n’a toujours pas regagné son poste. Ce lundi 18 avril, le chef du gouvernement espagnol Pedro Sanchez a appelé dans un entretien à la chaîne Antena 3 au retour à son poste de l’ambassadeur d’Algérie à Madrid.
La réponse d’Alger n’a pas tardé à venir. Dans une déclaration à l’agence officielle, Amar Belani, envoyé spécial chargé de la question du Sahara occidental et des pays du Maghreb a posé les conditions pour le retour à la normale entre l’Algérie et l’Espagne.
« Le retour de l’ambassadeur d’Algérie à Madrid sera tranché souverainement par les autorités algériennes », a indiqué M. Belani. L’Envoyé spécial a ajouté que cette décision sera prise dans le cadre de « clarifications préalables » et « franches » pour reconstruire une « confiance sérieusement abîmée » sur la base de « principes clairs, prévisibles et conformes au droit international ».
L’ambassadeur algérien va plus loin en affirmant que ce qui se passe entre Alger et Madrid n’est pas juste un nuage d’automne qui va se dissiper rapidement. Pour lui, ceux qui parlent d’une « colère passagère de l’Algérie, ils ne sont pas en phase avec la réalité ».
Amar Belani corrige Pedro Sanchez
Après avoir posé les conditions pour le retour de l’ambassadeur d’Algérie à son poste, Amar Belani s’en prend à Pedro Sanchez qui a affirmé que la nouvelle position de son pays sur le Sahara occidental était conforme aux résolutions de l’ONU.
Pour Belani, les propos du chef du gouvernement espagnol sont d’une « légèreté déconcertante ». Ils correspondent, selon lui, à la volonté de « s’auto-absoudre de la lourde responsabilité personnelle dans l’adoption de ce surprenant revirement » sur le conflit du Sahara occidental qui « rompt avec la position d’équilibre traditionnelle de l’Espagne ».
« En se dédouanant, de manière aussi candide », ajoute Amar Belani, Pedro Sanchez a laissé « entendre que la nouvelle position » de Madrid sur la question du Sahara occidental était conforme aux résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU et qu’elle s’aligne également avec la position d’autres pays. L’occasion pour l’ambassadeur algérien de rappeler au chef du gouvernement espagnol que son pays a une « responsabilité particulière, tant sur le plan moral que juridique en sa qualité de puissance administrante de juré (statut rappelé en 2014 par l’Audiencia nacional) » et en sa « qualité de membre » du Groupe des amis du Sahara occidental auprès du SG de l’ONU.
Pour Amar Belani, la démarche qui consiste à relativiser la gravité de ce changement de la position de l’Espagne sur la question du Sahara occidental en la comparant avec la position de certains pays comme la France et l’Allemagne sur l’autonomie est « abusive et ne reflète pas la réalité ».
Mieux, Amar Belani rappelle à Pedro Sanchez que les Etats-Unis évoquent « une approche potentielle », alors que Paris indique que c’est « une base » et que Berlin s’est exprimé sur cette option en la qualifiant de « base possible ».
« On est bien loin de l’affirmation péremptoire au sujet de l’autonomie qui serait la base la plus sérieuse, réaliste et crédible, ce qui équivaut à la reconnaissance indue de la marocanité du Sahara occidental, un territoire non autonome dont le statut final reste à déterminer et qui est éligible à l’autodétermination conformément à la légalité internationale », assène encore Amar Belani.