La suspension des manifestations hebdomadaires du hirak fait désormais l’unanimité parmi la classe politique et les activistes du mouvement populaire.
Dimanche soir, c’est Mostafa Bouchachi, l’une des figures les plus connues du hirak, qui s’est exprimé en faveur d’une pause. « La sagesse impose la suspension momentanée des marches afin de préserver la santé publique. En attendant l’évolution de la situation, il s’agit de la meilleure voie pour préserver le caractère civilisé du hirak, tout en réfléchissant ensemble à des alternatives », a écrit sur son compte Facebook l’avocat et militants des droits humain. Me Bouchachi, pour rappel, est un habitué des marches hebdomadaires du vendredi et un acteur très actif du hirak.
Mohcine Belabbas n’a lui aussi presque raté aucune marche depuis le début du mouvement en février 2019 mais ce dimanche soir, il a appelé à faire prévaloir la raison.
« Faire prévaloir et prioriser la santé des Algériens est de la responsabilité de tous », estime le président du RCD. Ce lundi matin c’est son prédécesseur à la tête du parti, Saïd Sadi, qui s’est exprimé, indiquant qu’ « en révolution, la raison prime la passion. Pour vivre libre, il faut être vivant ».
Le bureau exécutif du Mouvement de la société pour la paix (MSP) s’est réuni et a abordé la question, soutenant notamment l’idée d’une pause du hirak. « L’idée d’une suspension du hirak qui circule parmi les activistes, on doit la considérer comme une idée responsable qu’il faut adopter. Elle est de nature à renforcer la crédibilité de ceux qui luttent pour la liberté et rendra leur combat plus efficace. Les autorités doivent aussi prendre des mesures, dont l’arrêt des poursuites et la libération des détenus », a indiqué le parti dans un communiqué.
Le sélectionneur de l’équipe nationale de football, Djamel Belmadi, s’est lui aussi exprimé sur le sujet. Il n’a pas évoqué les marches du hirak, mais appelé les citoyens à la vigilance.
« En ces temps un peu flous et perturbés, je voulais en tant que citoyens et en tant que sélectionneur m’adresser à tous mes compatriotes là où ils se trouvent. Avant toute chose, je veux leur dire de prendre soin d’eux et de leur famille, de prendre toutes les mesures nécessaires que nous connaissons tous concernant ce fléau. (…) Je profite pour dire à nos valeureux joueurs de prendre soin d’eux et de leur famille et leur transmet à tous mes sincères salutations. Qu’Allah nous protège et nous épargne de ce mal », a dit le coach des verts dans un message posté audio sur la page Facebook de la FAF.
Hier, dimanche, de nombreuses personnalités nationales, dont certaines sont très proches du mouvement populaire, ont appelé à suspendre momentanément les marches. Parmi elles figurent le journaliste Hafid Derradji, le militant Saïd Salhi, le scientifique Noureddine Melikchi, l’homme politique Djillali Sofiane et l’ancien diplomate Abdelaziz Rahabi.
Samedi, le Premier ministre avait appelé le hirak à l’union sacrée pour faire face au risque d’une épidémie. « Nous attendons de tous les Algériens et Algériennes qu’ils aient cette conscience collective. Devant les épreuves et les crises, le peuple algérien s’unit toujours. D’un point de vue biologique et sanitaire, nous sommes devant une vraie guerre, nous devons donc s’entendre et s’unir pour préserver la santé du peuple algérien », a déclaré Abdelaziz Djerad
Ce lundi, sur la Chaîne III, le ministre de la Santé Abderahmane Benbouzid a jugé qu’il était « très dangereux scientifiquement » de poursuivre le mouvement populaire (Hirak). « Au delà des revendications populaires que je respecte, le Hirak est avant tout un regroupement de personnes parmi lesquelles il pourrait y avoir des porteurs du coronavirus qui risquent de contaminer d’autres. Donc, scientifiquement, il est très dangereux de poursuivre le Hirak », a-t-il soutenu.
Il a ajouté que la suspension des marches et les mobilisations populaires relève du « bon sens patriotique » des citoyens, rappelant que l’interdiction de tout regroupement faisait partie des mesures préventives prises contre la propagation de Covid-19, qui a déjà fait quatre morts et contaminé 54 personnes à travers huit wilayas. « Un nombre réduit mais demeure inquiétant », a-t-il commenté.