Le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (Minurso) a été prolongé vendredi 29 octobre par une résolution du Conseil de sécurité.
Le texte, proposé par les Etats-Unis, est jugé favorable aux thèses marocaines. L’Algérie, par « solidarité » avec le peuple du Sahara occidental a exprimé ce dimanche 31 octobre son « profond regret » et fait savoir qu’elle ne soutiendra pas le texte.
La presse marocaine, en revanche, jubile mais en veut à la Tunisie qui s’est abstenue lors du vote. Sur les 15 membres du Conseil de sécurité, 13 ont voté en faveur du texte et deux, la Tunisie et la Russie, se sont abstenus.
Dans les journaux du royaume, la neutralité tunisienne n’est que peu appréciée. Ils sont pourtant deux pays à ne pas voter la résolution, mais seule la Tunisie est prise à partie dans la presse marocaine qui parle de « volte-face » et de « coup de poignard ».
« Le régime discrétionnaire de Carthage, qui fait face à une double crise interne politique et économique, s’est abstenu aux côtés de la Russie lors du vote de la résolution du Conseil de sécurité favorable au Maroc (…) Une surprise pour l’opinion publique marocaine qui ne s’attendait pas à cette volte-face du régime de Kaïs Saied, d’autant plus que la république du jasmin avait acquiescé l’an passé à une résolution presque similaire de l’instance exécutive de l’Onu », écrit le Desk.ma.
Deux poids, deux mesures
« Le peuple marocain a une mémoire et n’oubliera peut-être jamais le faux bond tunisien, pour ne pas dire le « coup de poignard » planté dans le dos de son pays », renchérit pour sa part le collimateur.ma.
Même après « l’explication » d’un conseiller du président tunisien, la colère ne s’estompe pas au Maroc. Walid Al Hajjam a précisé dès vendredi que « la Tunisie tient à ses relations historiques et fraternelles distinguées avec tous les pays du Maghreb, et adhère au principe de neutralité positive dans sa gestion du dossier du Sahara occidental ». « À quoi joue la Tunisie ? », s’interroge le Siteinfo.com.
« La Tunisie de Kaïs Saïed souffle le chaud et le froid », titre de son côté le 360.ma, qui juge que « cette déclaration tardive reste vague et molle, et contredit la position constante de la Tunisie sur la question du Sahara marocain depuis l’indépendance, quels que soient les régimes et les présidents ».
Curieusement, ce jugement est repris dans les mêmes termes par de nombreux journaux marocains, ce qui laisse deviner une réaction concertée et coordonnée.
Au cours du vote de vendredi, il y a eu deux abstentions, mais seule celle de la Tunisie est dénoncée unanimement dans le royaume où on évite soigneusement de s’en prendre à la Russie.
« Entre les deux abstentions, il y a une différence très importante. (…) sa position (de la Russie) ne vient que pour répéter un exercice habituel dans la diplomatie russe vis-à-vis non seulement du Maroc, mais des États-Unis (…) Cette position (de la Tunisie) a été mal reçue par les instances arabes et marocaines, parce que le fait de voter cette résolution n’est en réalité pas une position pro-marocaine », tente d’expliquer Tajeddine Houssaini, professeur à l’université de Rabat, au site H24info.
Ce deux poids, deux mesures dans la dénonciation de la même position pourrait toutefois trouver sa véritable explication dans le désir du Maroc de régler son compte au voisin maghrébin qu’il trouve trop proche de l’Algérie ces derniers mois, et de ne pas provoquer une crise avec la Russie.
« Les Marocains n’acceptent pas le fait que la Tunisie soit un pays souverain qui prend ses décisions en toute liberté et en connaissance de cause. La neutralité positive ne veut pas dire que le pays doit s’aligner sur les thèses du Maroc ou de ses parrains américains et français », explique une source algérienne à TSA.