La zone démilitarisée de Guerguerat cristallise toutes les tensions entre le Maroc et le Front Polisario. Le 1er avril, le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, avait « mis en garde » le Polisario contre ses « provocations », parlant d’ « agissements dangereux dans la région de Tifariti et Bir Lahlou », des localités situées dans la zone démilitarisée.
Des accusations démenties le lundi 2 avril par l’ONU, la Minurso ayant affirmé n’avoir « enregistré aucune violation de l’accord de cessez-le-feu ».
La zone tampon de Guerguerat a été instaurée par le cessez-le-feu signée par le Polisario et le Maroc en 1991. L’accord prévoit qu’aucune force armée ne doit être déployée au sud de la localité de Guerguerat, entre la frontière Mauritanienne et le mur de défense érigé par les Forces armées royales marocaines (FAR).
Si cette zone démilitarisée est souvent l’objet de tensions entre le royaume chérifien et le Polisario, c’est parce qu’elle revêt un intérêt économique de premier ordre. Les territoires sahraouis libérés s’étendant à l’ouest de la frontière algérienne et sur une étroite bande longeant la frontière mauritanienne, Guerguerat reste le seul point de passage terrestre entre le Maroc et la Mauritanie.
Point de crispation entre le Maroc et le Polisario
La zone au statut particulier est administrée par les casques bleus de l’ONU qui assurent un droit de passage aux civils qui transitent ainsi entre les territoires libérés du Sahara occidental, le Maroc et la Mauritanie. Mais des actions sporadiques sont entreprises par les deux parties en conflit qui dénoncent à tour de rôle des incursions de forces armées ennemies dans la zone.
En août 2016, le Polisario était entré dans la bande tampon avec des forces armées en réponse à une incursion d’unités marocaines dont le but était, selon le Makhzen, de protéger les équipements et les ouvriers qui goudronnaient la piste reliant le poste de l’armée marocaine à Guerguerat au poste-frontière mauritanien. L’incident qui a failli virer à l’affrontement s’est finalement réglé par le retrait des deux parties de la zone tampon.
Une zone de non-droit
Le statut particulier de la zone de Guerguerat en a fait un véritable no man’s land, une zone de non-droit. Les forces de l’ONU, seules autorisées à être présentes sur place ne protègent ni les commerçants ou les routiers qui traversent la zone ni les réfugiés qui sont de plus en plus nombreux à emprunter cette voie de passage entre le Sud et le nord de l’Afrique.
Les vols, le racket de routiers, le trafic de drogue, de voitures et d’autres produits sont devenus les activités « commerciales » principales de la région, au point où la zone de Guerguerat est surnommée « Kandahar », en référence à la ville afghane, symbole de désordre et d’insécurité.