Saïd Sadi ne mâche pas ses mots à l’égard de Rachad. Dans une contribution publiée sur sa page Facebook sous le titre, « Rachad : tentation totalitaire », l’ex-président du RCD dézingue le mouvement islamiste, basé à l’étranger.
« Depuis maintenant plusieurs mois, deux injonctions envahissent la blogosphère : il est interdit de parler idéologie – entendre principes démocratiques- et il doit être admis que l’islamisme n’est en rien impliqué dans les crimes de masse des années 90. Cette ligne a un promoteur : l’organisation Rachad avec ses connexions internationales, ses ressources financières, ses relais médiatiques, ses méthodes et ses objectifs », écrit d’emblée Saïd Sadi, qui s’en prend directement et sans gants à Rachad.
Rapidement, le fondateur du RCD entre dans le vif du sujet : « Disons le d’entrée, dans les faits, cette organisation est une reconstitution d’une formation politique sur les débris du FIS…en plus sournois. » Il accuse le mouvement islamiste d’être lié à des puissances étrangères, et d’avancer à visage masqué. « À l’inverse des éléments du FIS qui avaient, malgré tout, réussi à garder une certaine autonomie politique, les membres de Rachad, y compris ceux qui s’improvisent commentateurs ou tuteurs de la révolution, sont, pour la plupart, des participants assidus des conférences de l’islamisme international ( Europe, Turquie, Qatar…). »
Il reproche à Rachad de s’arroger « le droit de parler et même de décider au nom d’une insurrection citoyenne » et affirme que cette « organisation dispose de moyens financiers lui permettant d’enrôler des agents assumés ou des supplétifs masqués qui activent quotidiennement à partir de l’étranger. » « Avec l’avènement du 22 février, le mouvement tente, pour l’instant sans grand succès, de construire des réseaux en Algérie », soutient le Dr Sadi.
L’ex-président du RCD affirme que Rachad a les moyens de sa politique. « Sa logistique médiatique est conséquente : télévisions, sites web, centres de recherches et de documentation, organisation de conférences sont autant de vecteurs distillant inlassablement une idéologie islamiste radicale dont l’obsession première est la stigmatisation ou le brouillage politique de toute initiative invitant à la clarification démocratique. »
Poursuivant son réquisitoire, il compare la démarche de Rachad « aux factions fascisantes des années trente où les apprentis dictateurs investissaient la sphère publique avec un discours jouant sur tout ce que peut offrir la légalité républicaine sans s’interdire de semer des allusions pouvant provoquer des opérations plus expéditives quand les opportunités le permettaient. »
Plus grave, Saïd Sadi reproche à Rachad de fermer les yeux sur les appels aux meurtres contre des intellectuels algériens comme Kamel Daoud ou Amin Zaoui. « Cependant, soumis aux lois des pays d’accueil en Europe, Rachad n’appelle pas ouvertement aux assassinats des intellectuels comme le faisait le FIDA. Les agressions physiques ou verbales ne sont pas explicitement revendiquées mais elles ne sont pas, non plus, condamnées », regrette Sadi.
Pour l’ex-président du RCD, « Rachad semble décidé à réécrire l’histoire des années 90 pour dédouaner l’islam politique de ses crimes afin de le légitimer dans ses prétentions actuelles. » Il pense que « si des islamistes veulent s’insérer dans le formidable mouvement de résurrection nationale conduit par les jeunes et les femmes d’Algérie depuis le 22 février, ils ont l’opportunité historique d’évoluer vers un courant politique conservateur qui a sa place dans l’Algérie démocratique ».
Au passage, Saïd Sadi n’hésite à embarquer le HMS (MSP) dans ses critiques, en estimant que le parti de Makri et Rachad jouent sur le même terrain.
« Faute de pouvoir dire maintenant que la démocratie est une hérésie, les nouveaux prophètes s’essaient à un jeu bien connu : utiliser la démocratie pour l’enterrer. Malgré leurs prétendues divergences, HMS et Rachad disent et font rigoureusement la même chose. Le système nous a donné l’école, la mosquée, les médias et la justice ; à partir du moment où les pétro-monarchies du Golfe ou la Turquie nous ont permis de saturer l’espace médiatique, allons vite au vote sans précaution ni sécurité. Ce genre de raccourci a mené Hitler au pouvoir. On connaît la suite.
Des élections sans fondamentaux démocratiques ne sont pas seulement un saut dans le vide ; c’est la cité infernale », met en garde Saïd Sadi.