Est-ce la nouvelle loi sur les hydrocarbures qui commence à porter ses fruits ou simplement la conjoncture internationale et la nouvelle carte énergétique mondiale qui contraignent les Occidentaux à consentir des investissements dans l’industrie pétrolière et gazière algérienne pour avoir plus d’énergie ?
Comme annoncé lundi 18 juillet par le président de la République Abdelmadjid Tebboune à l’issue de l’audience qu’il a accordée au Premier ministre italien Mario Draghi, Sonatrach a procédé ce mardi 19 juillet à la signature d’un contrat de 4 milliards de dollars avec les compagnies Occidental, ENI et Total Energies, portant sur la poursuite du développement et l’exploitation du périmètre de Berkine (blocs 404 et 208), à 300 kilomètres au sud-est de Hassi Messaoud.
La signature de ce contrat va permettre d’« alimenter l’Italie en très grandes quantités de gaz naturel », a annoncé lundi le président Abdelmadjid Tebboune.
Sonatrach et ses partenaires exploitent le périmètre depuis 1989, dans le cadre de la loi sur les hydrocarbures de 1986.
L’association a enregistré une production cumulée de l’ordre de 2,7 milliards de barils équivalents pétrole d’hydrocarbures et des investissements dépassant les 10 milliards de dollars, rappelle le géant gazier algérien dans un communiqué.
Le nouveau contrat est de type « partage de production » et est signé sous l’égide de la nouvelle loi sur les hydrocarbures de 2019. Il s’inscrit dans le cadre d’un protocole d’accord conclu entre les quatre compagnies le 31 janvier 2021.
Dans le cadre de ce contrat, Sonatrach et ses partenaires s’engagent à poursuivre le développement et l’exploitation de ce périmètre à travers un programme de travaux comprenant « une acquisition sismique 3D haute densité, le forage de 100 puits pétroliers, la reconversion de 46 puits, principalement en puits à procédé WAG, la réalisation d’études de schémas directeurs et d’optimisation des installation, l’implémentation de solutions Oilfield digitalization, la mise en œuvre de deux projets pilotes EOR (Enhanced Oil Recovery) et la réalisation de projets environnementaux relatifs à la réduction de l’empreinte carbone », détaille le communiqué de Sonatrach.
Ce programme permettra à terme « une récupération additionnelle de plus d’un milliard de barils équivalents pétrole d’hydrocarbures, ce qui augmentera le taux moyen de récupération ultime à 55 % ». Le montant des investissements prévus s’élève à près de 4 milliards de dollars, ajoute la même source.
39 milliards de dollars sur 4 ans
« La signature de ce nouveau contrat traduit la volonté des parties de poursuivre leur partenariat sur le périmètre contractuel de Berkine et de développer davantage leur coopération à travers la recherche de nouvelles opportunités de partenariat », conclut le communiqué de Sonatrach.
Le 24 février, dans un message lu en son nom par le Premier ministre Aïmene Benabderrahmane, à l’occasion de l’anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures, le président de la République avait annoncé que le montant des investissements prévus dans le secteur des hydrocarbures pour les quatre prochaines années en Algérie s’élevait à 39 milliards de dollars.
L’industrie pétrolière et gazière algérienne a pâti ces dernières années du manque d’investissements étrangers, ce qui a induit une baisse de la production.
D’où l’élaboration et la promulgation dans l’urgence d’une nouvelle loi sur les hydrocarbures, fin 2019, dans l’intervalle entre la démission de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika et l’élection de Abdelmadjid Tebboune.
Le déclenchement de la guerre en Ukraine en février dernier a rebattu les cartes sur le marché énergétique mondial et l’Algérie s’est retrouvée fortement sollicitée pour augmenter ses flux de gaz vers l’Europe qui a entrepris de réduire sa dépendance vis-à-vis de la Russie.
Un accord dans ce sens a été signé le 11 avril dernier entre Sonatrach et ENI, prévoyant l’augmentation des quantités de gaz livrées à l’Italie de 9 milliards de mètres cubes supplémentaires d’ici à 2023-2024.
De par ses importantes réserves et sa proximité géographique avec l’Europe, avec laquelle elle est reliée par trois gazoducs, le Transmed vers l’Italie et le Medgaz et le GME (fermé depuis novembre dernier) vers l’Espagne, l’Algérie se retrouve devant une opportunité pour attirer les investissements qui faisaient défaut jusque-là pour augmenter ses capacités de prospection et de production.
Interrogé en juin dernier par le journal allemand Der Spiegel, le ministre algérien de l’Énergie a clairement fait comprendre que pour avoir plus de gaz, il faudra consentir plus d’investissements.
« Si l’Allemagne veut nous acheter du gaz, alors ouvrez de nouveaux gisements avec nous. Comme les Italiens avec le groupe ENI (…) Nous espérons que les Européens ne changeront pas de cap et ne nous laisseront pas seuls avec les investissements », a plaidé Mohamed Arkab.