La porosité des frontières européennes a conduit certains dirigeants politiques au sein du Vieux Continent à plaider pour la fin de l’espace Schengen de libre circulation. En France en tout cas, c’est une demande érigée au rang d’absolue priorité par Marine Le Pen, la candidate de l’extrême droite à l’élection présidentielle. La dirigeante xénophobe a pris prétexte de la crise des réfugiés arrivés par centaines de milliers puis de la série d’attentats qui ont endeuillé la France pour demander la sortie de cet espace qui réunit aujourd’hui 27 pays. Ils n’étaient que cinq à sa création en 1985 : l’Allemagne, la Belgique, la France, le Luxembourg et les Pays-Bas.
En fait, en 2012 déjà, l’ancien président Nicolas Sarkozy avait envisagé une reprise des contrôles aux frontières avec en vue une maîtrise des flux migratoires. Les deux crises de l’année dernière ont conduit des députés du parti Les Républicains (droite) à mettre sur pied une commission d’enquête parlementaire. Elle vient de rendre son rapport, assorti de 32 propositions. Les sénateurs excluent une sortie de l’espace commun qui va se révéler extrêmement onéreuse en termes économiques.
« L’abandon, ou le démantèlement de Schengen, qui se traduirait par une restauration permanente des contrôles aux frontières nationales, affecterait directement plusieurs secteurs économiques et aurait des conséquences non négligeables, en France et en Europe, liées aux obstacles à la libre circulation tant des personnes que des marchandises », pointe sans hésiter la commission.
Pour la France, les coûts fixes seraient compris entre 880 millions et 2,1 milliards d’euros en investissements et entre 150,9 et 251,5 millions d’euros par an en coûts de fonctionnement, selon une étude citée par la commission. Au niveau de l’ensemble de l’espace Schengen, les investissements nécessaires s’établiraient entre 7,4 et 19,8 milliards d’euros et les coûts de fonctionnement annuels seraient compris entre 2,2 et 3,6 milliards d’euros.
Plutôt que de démanteler Schengen malgré ses « failles » avérées, la Commission souhaite le renforcer. Première proposition : suspendre l’élargissement de l’espace qu’attendent de rejoindre quatre pays : la Bulgarie, la Roumanie, Chypre et la Croatie. Ensuite, réviser le code frontières Schengen pour autoriser la réintroduction du contrôle aux frontières intérieures pour une durée maximale supérieure à 6 mois en cas de menace persistante pour l’ordre public ou la sécurité intérieure, par exemple pour 2 ans ; au-delà, la prolongation serait soumise à une clause de réexamen.