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Soutenu par l’Arabie saoudite, le plan de Trump pour la Palestine provoque un tollé

Les États-Unis organisent ce mardi à Bahreïn une conférence sur le futur plan de l’administration du président américain Donald Trump visant à « résoudre le conflit israélo-palestinien », un plan largement décrié à l’international et auquel la Palestine a refusé de participer.

Publié samedi soir, le plan proposé par la Maison Blanche vise un investissement de 50 milliards de dollars sur dix ans (dont la moitié seulement investie dans les territoires palestiniens), la création d’un million d’emplois, un PIB doublé, la construction d’un monorail express reliant Gaza à la Cisjordanie, ou encore l’installation de la 5G permettant de transformer l’économie palestinienne en hub pour start-up.

Le plan ne fait cependant aucune mention de l’occupation israélienne ou d’une solution politique. De même que la conférence de Bahreïn ne devrait pas concerner les questions politiques, pourtant au cœur du conflit datant de plusieurs décennies.

Indignation après la participation du Maroc

Les alliés des États-Unis que sont l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont salué la tenue de cette conférence, de même que le Maroc, la Jordanie et l’Égypte ont annoncé qu’ils enverraient des représentants pour y participer. L’annonce de la participation du Maroc a suscité l’indignation dans le pays, des milliers de manifestants sont sortis dans les rues de Rabat contre le « congrès de la honte ».

Le principal concerné, à savoir l’État palestinien, a quant à lui immédiatement rejeté le plan américain, son président Mahmoud Abbas affirmant que la conférence était vouée à l’échec. « Qu’est-ce que les Américains proposent d’original ? Cinquante ou soixante milliards de dollars ? Nous sommes habitués à ce genre de bêtises. Ne nous mentons pas les uns aux autres. Nous verrons bien si quelqu’un vit assez longtemps pour voir venir ces 50 ou 60 milliards de dollars », a ironisé Mahmoud Abbas.

« Commencez par arrêter le vol par Israël de notre terre, de nos ressources et de notre argent, donnez-nous la liberté de mouvement et le contrôle sur nos frontières (…) et ensuite regardez-nous construire une économie dynamique », a de son côté déclaré Hanane Achraoui, conseillère du président Abbas, à l’attention des États-Unis.

« Une chimère »

De nombreuses voix se sont également élevées pour critiquer le plan de l’administration américaine. « Si l’administration américaine n’avait pas passé les deux dernières années à faire des pressions économiques et politiques contre les Palestiniens et à saper leurs aspirations (…), ce plan aurait eu un sens », a par exemple affirmé Aaron David Miller, ancien négociateur américain au Proche-Orient.

« Le ‘’deal du siècle’’ de Trump pour la Palestine n’est qu’une chimère », a quant à elle estimé l’organisation de défense des droits de l’Homme, Human Rights Watch. « Le plan ignore le principal obstacle au développement économique de la Palestine : les violations des droits des Palestiniens commises par Israël », affirme l’ONG.

Évoquant le plan de mise en place d’un monorail reliant Gaza à la Cisjordanie, Human Rights Watch s’interroge : « À quoi sert un tel couloir quand Israël impose une interdiction de voyager aux deux millions de Palestiniens de Gaza qui les empêche presque tous de se rendre non seulement en Cisjordanie, mais ailleurs ? ».

« Le problème n’est pas le manque de routes, mais les restrictions à la liberté de circulation imposées par Israël et par l’Égypte, qui ont transformé Gaza en une espèce de prison à ciel ouvert », dénonce l’ONG.

« Une relance du processus de paix est certes essentielle, mais tout initiative qui ne prend pas en compte la dignité et les droits des Palestiniens est vouée à l’échec », conclut Human Rights Watch.

Ce mardi, le journal français Le Monde s’est également montré très critique vis-à-vis du plan économique américain, estimant qu’il s’agit d’un plan « ni fait ni à faire ».

Le plan « promet la 5G aux Palestiniens, alors que ceux-ci viennent à peine d’obtenir la 3G, après douze années de tractations avec l’armée israélienne, qui a le monopole des fréquences dans les territoires occupés », dénonce le quotidien dans son éditorial, décrivant le plan comme un « galimatias hors-sol, hors histoire et hors réalité, directement inspiré d’une droite israélienne qui rejette le principe d’un État palestinien aux côtés de l’État hébreu ».

Le Monde a également critiqué Jared Kushner, l’instigateur du plan américain qui est Conseiller et gendre du président Trump. « La particularité de l’approche du trentenaire new-yorkais réside dans son mépris ostensible du droit à l’autodétermination des Palestiniens. Au principe de la terre contre la paix, socle de toute résolution du conflit, sauf à s’aventurer sur le terrain miné de l’État binational, il veut substituer le principe de l’argent contre la paix », dénonce le journal.

« Cinquante milliards de dollars en échange du renoncement des Palestiniens à un État digne de ce nom. Si le mot ‘’occupation’’ n’apparaît pas dans le plan Kushner, c’est parce qu’il a vocation à la perpétuer », conclut l’éditorial du Monde.

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