Le président Abdelmadjid Tebboune a présidé ce samedi une nouvelle réunion gouvernement-walis où il a évoqué à nouveau le climat des affaires en Algérie, plombé par les enquêtes sur la corruption et le retard pris par la dépénalisation de l’acte de gestion.
Devant un parterre de walis et de ministres, le chef de l’Etat a tenté de rassurer sur la dépénalisation de l’acte de gestion, en attendant que cela soit traduit par des textes réglementaires et inscrit dans le marbre.
« En ce qui concerne la protection des cadres, nous avons déjà envoyé une instruction présidentielle à tous les concernés de ne plus prendre les lettres anonymes comme base pour lancer des enquêtes. Nous avons donné des ordres pour qu’en cas de problèmes, les enquêtes ne doivent pas être menées localement, mais au niveau central à Alger, et avec une autorisation de la tutelle pour éviter des dépassements », a expliqué le président Tebboune.
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Le chef de l’Etat a ajouté que pour lancer une enquête, il faut qu’il ait des « soupçons ». « Pour la personne qui signe en faveur d’un entrepreneur ou d’un investisseur sans bénéficier lui ou ses proches, ou est le mal ? Même s’il n’a pas appliqué la loi à lettre, cela est considéré comme une faiblesse dans la gestion, une faute ».
Poursuivant, le président Tebboune a demandé aux ministres de recevoir les investisseurs. « Si un investisseur n’est pas reçu par le ministre, qui va le recevoir ? Il va le décourager et il risque de tomber entre les mains d’intermédiaires qui sont nombreux et parlent au nom des ministres, même au nom du président ».
Le contre-exemple de Tebboune
Tebboune a ajouté que l’investisseur a besoin de la protection de l’Etat et que l’Etat a besoin de lui pour créer des richesses et des emplois.
Le président de la République a cité un contre-exemple où un cadre de l’Etat peut faire l’objet de poursuites judiciaires. « Après six dans un poste de responsabilité, il achète un appartement à Paris. Après cinq ou six mois comme responsable, il achète une villa à Alger, Constantine ou Oran. Il y a des soupçons qui sont claires. Pour celui qui vit avec son salaire, et réputé pour sa probité, il n’a rien à craindre », a-t-il dit.
Echaudés par les enquêtes sur la grande corruption lancées en 2019, après la démission du président Abdelaziz Bouteflika sous la pression de la rue et de l’armée, des cadres de l’Etat et les gestionnaires publics rechignent à prendre des initiatives par craintes de poursuites judiciaires. A plusieurs reprises, le président de la République est intervenue pour tenter de désamorcer la crise, afin d’améliorer le climat des affaires en Algérie, dans un contexte de grave crise économique.
« Le climat des affaires dans notre pays enregistre ces derniers mois un recul de la cadence des investissements qui se traduit par l’hésitation des investisseurs à entamer des projets à cause des lenteurs dans le traitement des dossiers relatifs à l’investissement local », écrivait le chef de l’Etat dans une instruction, adressée fin août par le ministre de l’Intérieur aux walis, walis délégués et secrétaires généraux des wilayas. Il a annoncé à ces derniers qu’aucune enquête anti-corruption les concernant ne peut être lancée sans l’aval de la tutelle.
Il y a plus d’une année, le 18 août 2020, lors d’une réunion similaire, Tebboune a pris l’engagement de dépénaliser l’acte de gestion, et annoncé la fin de l’ère des « lettres anonymes » dont la destination sera désormais « le broyeur ».