L’Algérie est confrontée depuis quelques semaines à une nouvelle vague de contaminations au covid-19. Un rebond épidémique qui a provoqué de fortes tensions sur certains médicaments entrant dans le protocole thérapeutique de lutte contre cette maladie.
Lotfi Benbahmed, ministre de l’Industrie pharmaceutique s’est exprimé ce lundi 31 janvier sur la question qui suscite la polémique.
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« Il ne peut pas y avoir de rupture de produits entrant dans le protocole thérapeutique du covid pour la simple et bonne raison que l’ensemble de ces produits, que ce soit les héparines, le Lovenox, Varenox, le Paracétamol, la vitamine D, les antibiotiques, les tests et même les vaccins et l’oxygène sont produits localement« , a-t-il dit dans un entretien à la Chaîne III de la Radio nationale.
« La production de l’ensemble de ces produits, depuis une année et demie a été mise en place ou a été doublée, triplée, voire quadruplée en termes de quantité. Il y a une disponibilité en continue« , a-t-il assuré.
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Selon lui, « il y a eu un certain nombre de phénomènes qui ont fait que la disponibilité a été remise en cause à un moment donné« .
« Nous sommes en période de pandémie, on ne peut pas envisager la problématique de consommation de produits pharmaceutiques comme si nous étions en temps normal », a-t-il expliqué.
« Pour produire un médicament, ce n’est pas seulement de la matière première sur laquelle il y a une tension à l’échelle internationale et toutes les problématiques inhérentes au transport. Pour les seringues utilisées dans l’administration du Lovenox, il y a sept mois d’attente au niveau international. Pour le paracétamol, nous avions quatre unités de production, nous en avons aujourd’hui dix. Nous livrons près de trois millions de boîtes par semaine. Nous avons livré plus de 1,2 millions de seringues pour le Lovenox la semaine dernière. La pandémie n’est pas une situation normale. Nous sommes dans l’action, pas uniquement dans le commentaire« , a-t-il détaillé.
Mesures pour lutter contre les pénuries de médicaments anti-covid
Le Dr Benbahmed assure que les producteurs de médicaments en Algérie sont « mobilisés pour porter au maximum leurs capacités de production« . Il explique les tensions sur certains médicaments par deux facteurs : « Le lobby de l’importation du médicament » et la « spéculation ».
Afin d’assurer la disponibilité des médicaments, le ministère de l’Industrie pharmaceutique a instauré, le 18 janvier dernier, de nouvelles mesures obligeant producteurs, importateurs et distributeurs à mettre sur le marché toutes les quantités de médicament y compris celles en stocks, et ce dans un délai maximum de 48 heures.
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Concernant cette mesure, le ministre explique qu’ « il y a la réquisition, c’est-à-dire demander aux producteurs d’augmenter au maximum leurs capacités de production et de ne pas retenir les produits ».
« Que toutes les boîtes produites aillent en 48 h aux distributeurs, puis que toutes les boîtes qui arrivent chez les distributeurs aillent, aussi, en 48 heures, chez les pharmaciens d’officine. Il y avait de la rétention. Il y avait de la spéculation. Une spéculation, qui contrairement aux produits alimentaires, ne permet pas d’augmenter les prix mais qui permet aux spéculateurs de booster leurs ventes et de faire de la vente concomitante. Un procédé totalement interdit« , a-t-il dit.
Le ministre précise que depuis l’instauration de cette mesure et « après une campagne d’inspection qui n’a duré qu’une semaine, des produits apparaissent comme par enchantement« . Il poursuit : « Des sanctions ont été prononcées et des fermetures ont été notifiées à certains distributeurs« .
« Le lobby de l’importation du médicament »
Le ministre de l’Industrie pharmaceutique pointe du doigt le « lobby de l’importation du médicament » qui est derrière ces tensions.
« Depuis la création de notre ministère, nous avons dû nous battre contre le lobby de l’importation« , a-t-il dit. Un lobby, qui, selon le ministre, « se retrouve aussi aujourd’hui au niveau de la distribution et qui à travers la spéculation et la rétention rêve que le ministère (de l’Industrie pharmaceutique) perde ses prérogatives« .
Plus grave, il affirme que les « détracteurs ne se cachent même plus. Ils défendent l’importation à tout prix. Il n’y a pas eu d’arrêt d’importation pour les produits covid. Ces produits sont indisponibles à l’échelle internationale. Bien heureusement que nous les fabriquons localement« . Selon le ministre, « seuls les produits non essentiels ne sont plus importés« .
« Nous n’importons plus les médicaments qui ne sont pas essentiels et qui sont fabriqués localement quand ils sont en quantité suffisante. Si on veut que notre pays se développe, on doit compter sur notre production. Il y a une baisse de la facture d’importation de 800 millions de dollars mais une augmentation de la facture de production nationale de plus d’un milliard. Le marché du médicament a donc augmenté de deux cents millions« , a-t-il soutenu.
« Mis à part quelques traitements dont il y a quelques unités de production dans le monde, pratiquement tous les produits pharmaceutiques sont produits en Algérie, et cela va augmenter encore. En fill and finish, nous avons près de quatorze unités de production « stérile ». Nous avons le même nombre qui est en train de se mettre en place en oncologie. Certains pays aspireraient à arriver à ce niveau. Nous, nous sommes déjà arrivés à ce niveau-là. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura plus jamais de problématique de perturbation sur le marché. Il peut y avoir des problématiques réglementaires, de matière première, d’intrants, de dispositifs et de transport« , a-t-il déclaré.
Polémique autour du prix des tests antigéniques
La 4e vague de coronavirus qui frappe actuellement a mis en lumière de nouveau la cherté des tests de dépistage du covid-19. Des tests qui restent pour de nombreux citoyens, hors de portée. Depuis quelques jours, des autotests sont vendus à partir de 1000 DA en pharmacie.
« Actuellement les quantités de tests sont très largement suffisantes. Il y a des importations qui sont en cours. Il y a également des productions locales avec des prix accessibles. Ce qui permet à l’ensemble des citoyens d’avoir accès à ce produit« , a déclaré le ministre
Stratégie pour 2022
La stratégie du ministère de l’Industrie pharmaceutique pour l’année 2022 se résume, selon Benbahmed, en quatre points : développement de la production nationale, oncologie, diabète et export.
« Notre stratégie : continuer à développer et à élargir la production. 2022 sera l’année de l’oncologie en Algérie, du diabète avec deux nouvelles unités de production d’insuline, et de l’exportation« , a indiqué le ministre.
« Le ministère de l’Industrie pharmaceutique, avec le ministère du Commerce, organisera une foire en Mai, à Dakar, en Afrique de l’Ouest. Une foire spécifique à l’industrie pharmaceutique algérienne. Ce sera le coup d’envoi d’une nouvelle politique d’exportation. 2022 sera la première année où nous mettrons en place des programmes prévisionnels d’exportation« , a par ailleurs tenu à faire savoir le ministre.