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Titre de séjour : le combat d’un médecin maghrébin pour rester en France

Un paradoxe qui illustre la gestion à la hussarde des affaires liées à l’immigration par certaines préfectures. Alors que les hôpitaux du pays ne tiennent que grâce à l’apport des praticiens étrangers, un médecin tunisien a dû batailler et recourir à la justice pour obtenir le droit de continuer à exercer en France.

Le journal “L’Orne Combattante” qui rapporte ce cas ne précise pas l’identité du médecin urgentiste de ans 44 ans, nommé en juillet 2022 comme praticien associé au centre hospitalier de la ville de Flers (Orne, en Normandie). Il avait derrière lui une expérience de 10 ans en Tunisie comme médecin urgentiste. 

En France, où de nombreux hôpitaux manquent de médecins, notamment urgentistes, il a conclu avec l’hôpital de Flers un contrat de travail de deux ans correspondant au « parcours de consolidation des compétences ». 

Il avait un visa « travailleur temporaire » valable jusqu’en janvier 2023

Selon les explications du même journal, le médecin tunisien avait sollicité entre-temps, le 12 octobre 2022, un changement de statut afin d’obtenir un titre de séjour“Passeport talent” ou Carte bleue européenne (CBE), l’équivalent de la Green Card américaine.

Il avait opté pour cette procédure car elle lui permettrait de faire venir rapidement en France sa femme et ses enfants restés en Tunisie. 

Selon le Code européen de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), la CBE permet l’exercice d’une activité professionnelle salariée et de faire venir sa famille, avec la condition pour les médecins de justifier d’un parcours de consolidation de compétences de deux ans et des épreuves de vérification des connaissances.

La justice au secours d’un médecin tunisien face à l’administration française 

À son grand étonnement, le médecin tunisien s’est vu signifier par la préfecture que sa demande de CBE a été « clôturée » au motif que les professions médicales sont réglementées,

Le préfet avait avancé que le médecin ne « disposait pas d’une autorisation de travail délivrée par la plateforme de main-d’œuvre étrangère ».

Face à cet imbroglio administratif, le médecin n’avait plus d’autre choix que de recourir à la justice. D’abord en référé. En mai 2023, le tribunal administratif de Caen a suspendu l’exécution de la décision du préfet. 

Devant la justice, le médecin a expliqué que sa situation a eu des répercussions sur sa famille éloignée de lui. Son fils aurait « des troubles du comportement liés à l’absence du père », selon une pédopsychiatre qui l’a examinée en Tunisie. 

L’hôpital qui l’emploie lui a aussi apporté son soutien, expliquant qu’il pratiquait une spécialité sous tension et qu’il pourrait démissionner si sa séparation avec sa famille perdure. 

L’affaire a été jugée dans le fond le 11 juillet dernier et le verdict est en faveur du médecin. La législation en vigueur ne conditionne pas la délivrance du “passeport talent” à la production de l’autorisation de travail, a indiqué le tribunal dans son jugement, estimant que le préfet à commis une “erreur de droit”. 

Celui-ci a été sommé d’instruire sous un mois la demande de « passeport talent » du médecin tunisien qui a en outre obtenu une indemnisation de 1 200 € représentant les frais de justice.

 

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