Pour produire ses propres huiles de table, l’Algérie a déployé un vaste plan pour encourager la culture des oléagineux, dont le tournesol. Un nouveau dispositif d’aides publiques aux agriculteurs a été mis en place.
Ces subventions sont destinées aux trois intervenants dans cette filière : agriculteurs, usines de trituration et coopératives agricoles, selon le ministère de l’Agriculture et du développement rural.
Selon des informations en provenance du ministère de l’Agriculture et du Développement rural, les prix payés aux agriculteurs pour le tournesol devraient être revus à la hausse. Des mesures qui visent à susciter une plus grande adhésion des agriculteurs au programme de développement de cette culture considérée comme stratégique.
Sur le marché mondial, le prix de la tonne de tournesol fluctue. Aussi, les agriculteurs algériens devraient bénéficier d’un prix minimum garanti de 5. 600 DA par quintal de tournesol.
A cela devrait être ajoutée une prime d’État de 3.000 DA, soit un total de 8.600 DA. Par comparaison, le quintal de blé dur est actuellement payé 6.000 DA le quintal. Une prime qui passe de 3.000 DA à 3.500 DA dans le cas des agriculteurs organisés en coopératives agricoles.
Un mécanisme de prix dont l’agriculteur Mohamed Haroun de Constantine fait remarquer qu’au prix mondial actuel de 490 euros la tonne de tournesol et sur la base d’un euro équivalent à 148 DA, l’agriculteur pourrait se voir proposer un prix de base de 7.300 DA.
Pour leur part, les transformateurs devraient recevoir 500 DA sur chaque quintal et les organismes de collecte et de stockage 900 DA par quintal.
Cette augmentation des aides publiques concerne une culture nouvelle en Algérie et dont les services agricoles souhaitent étendre les surfaces jusqu’à 45.000 hectares au nord afin de réduire les importations.
Plusieurs usines de trituration
La mise en service de plusieurs usines de trituration dont celles de Cevital, Madar et Sim a permis de faire passer l’industrie locale du seul raffinage d’huiles brutes importées à celle de la transformation de graines d’oléagineux. Une situation qui a permis d’entrevoir la possibilité de cultures locales d’oléagineux et leur transformation.
Certes, les quantités produites par les agriculteurs locaux étaient modestes par rapport aux capacités de transformation des usines et des besoins du marché national.
Mais cette première opération a marqué un cap décisif. Il est à noter que l’activité de trituration de soja, colza ou tournesol s’accompagne de la production d’un sous-produit : les tourteaux.
Ces derniers sont actuellement massivement importés pour être intégrés dans l’alimentation animale. Dans le cas du tourteau de soja, celui-ci peut également être utilisé en alimentation humaine après passage dans une extrudeuse.
C’est en mai 2023 que Cevital a inauguré son usine de trituration de Béjaia avec une capacité de traitement de 6.000 tonnes de tournesol, 5.000 tonnes de colza et 11.000 tonnes de soja.
Des capacités installées qui devraient permettre de répondre à une consommation annuelle de 900 000 tonnes d’huile de table reposant essentiellement sur l’importation.
Le tournesol, une culture méconnue des agriculteurs algériens
En Algérie, la culture du tournesol est actuellement pratiquée sur de très petites surfaces tant au nord qu’au sud du pays.
Dans la wilaya de Chlef, cette année la culture de tournesol a été expérimentée dans les communes d’El Karimia et Lebiod Medjadja note l’agence APS.
Ce sont 5 hectares qui ont été récoltés. Selon l’ingénieur de l’ITGC qui a suivi cette première, il reste un travail à faire « sur le choix des variétés » les plus adaptées.
L’année passée, dans la wilaya de Tiaret deux agriculteurs avaient également consentis à semer quelques hectares de tournesol sur insistance des services agricoles de la wilaya.
A chaque fois ce sont les services agricoles qui exhortent les agriculteurs à se tourner vers cette nouvelle culture.
Dans les deux cas, ces surfaces ont dû être irriguées. A cette occasion, un des agriculteurs avait indiqué en 2023 que face au surcroit de travail et de charges, il était souhaitable que le prix d’achat du quintal de tournesol soit revu à la hausse.
La même année, dans la wilaya d’Annaba, sur de bonnes terres, la culture de tournesol testée par un agriculteur a permis d’obtenir un rendement de plus de 20 quintaux et cela sans irrigation.
Contrairement au colza qui est semé à l’automne, le tournesol est semé au printemps ce qui l’expose au risque de manque de pluie et peut nécessiter le recours à l’irrigation. Ce recours entraîne une hausse des charges et met le tournesol en concurrence avec d’autres cultures à la marge brute plus élevée : culture de pastèque ou de maïs ensilage.
L’agriculteur doit intégrer le fait que dans la rotation, la culture de tournesol permet de pallier à la quasi monoculture des céréales et de ce fait réduit l’effet des parasites et des ravageurs. Par contre, après récolte, le tournesol ne produit pas de paille ; un produit très prisé par les éleveurs de moutons.
La culture de tournesol présente une particularité. Il est nécessaire que les températures soient au-dessus de 8°C pour que les semences germent. Des essais réalisés dès 2018 dans les pays voisins avec des variétés de tournesol moins sensibles au froid montrent que des semis effectués au mois de décembre permettent des rendements de 26 quintaux, 25 en février, 18 en mars contre seulement 13 en avril.
L’alternative pourrait donc être d’utiliser, selon le climat de chaque région, des variétés précoces afin d’éviter le stress hydrique de fin de cycle et le recours à l’irrigation.
Reste le développement du tournesol sous pivot d’irrigation dans le sud algérien. En juillet, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural a indiqué que les investisseurs bénéficiant de concessions au niveau de périmètres avaient obligation de présenter un plan triennal comportant des cultures stratégiques dont du tournesol.
Tournesol, le problème de la facturation
Après avoir misé ces dernières années sur la culture du colza, comme c’est le cas en Tunisie, les services agricoles algérien se tournent vers le tournesol.
Avec l’attribution d’une prime et de prix garantis, les agriculteurs qui souhaitent semer le tournesol bénéficient d’un avantage financier conséquent.
Il reste à se pencher sur les techniques de culture et déterminer si le recours à des semis précoces peut permettre de réduire le recours à l’irrigation. A ce titre, la coopération technique internationale peut permettre de gagner un temps précieux, notamment dans le domaine de la production de semences.
La réussite de la culture du tournesol passera également par le soutien matériel et technique que pourront apporter aux agriculteurs les transformateurs locaux.
Elle passe aussi par le règlement de la question liée à la facturation qui représente un frein pour le développement des cultures comme le tournesol.
Les usines de trituration ont besoin de factures délivrées par les agriculteurs pour acheter leurs récoltes, mais certains agriculteurs refusent de travailler avec la facture pour différentes raisons.
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