Les Algériens sont appelés à s’exprimer le 1er novembre prochain sur le projet de révision constitutionnelle. Quelques éclaircissements à propos du projet et du référendum, à moins de 15 jours de cette consultation populaire.
Pourquoi une révision constitutionnelle ?
C’est l’un des projets-phares du président de la République Abdelmadjid Tebboune. Avant même son élection le 12 décembre dernier, il avait promis de doter l’Algérie d’une nouvelle Constitution qui lui épargnerait de tomber de nouveau dans le « pouvoir personnel » et permettrait de satisfaire les revendications du hirak.
Le chef de l’État a toujours expliqué que ses deux chantiers prioritaires sur le plan politique sont la révision de la Constitution et l’élaboration d’une nouvelle loi électorale. La préparation de cette dernière est confiée au Pr Laraba qui a aussi mené le comité d’experts qui a élaboré le projet de révision constitutionnelle.
Le contexte et les enjeux
Le référendum du 1er novembre survient dans un contexte particulier pour le pays, marqué par une contestation et des marches populaires hebdomadaires de février 2019 à mars 2020, puis par une crise sanitaire qui se poursuit. Dans le même temps, les arrestations de militants et d’activistes se poursuivent.
Le taux de participation constitue un enjeu important pour les autorités qui souhaitent faire mieux que lors de la présidentielle (40 %) du 12 décembre 2019. Le pouvoir soutient que le lancement véritable des chantiers de la « nouvelle Algérie » ne se fera qu’après l’adoption de la nouvelle Constitution.
La démarche suivie
Sous Abdelaziz Bouteflika (1999-2019), la Constitution a été amendée à trois reprises. En 2002 pour donner à Tamazight le statut de langue nationale, en 2008 pour faire sauter le verrou de la limitation du nombre de mandats présidentiels et en 2016. Les trois révisions ont été adoptées par le Parlement sans être soumises à l’approbation du peuple par référendum.
Cette fois, le président Tebboune a tenu que la nouvelle Constitution soit approuvée par le peuple, après l’avoir été par les deux chambres du Parlement les 10 et 12 septembre dernier.
Dès le 8 janvier, soit 20 jours seulement après son élection, Tebboune avait nommé le Pr Laraba à la tête d’un comité d’experts chargé de faire des proposition et de réunir celles des acteurs de la vie nationale. Une première mouture est rendue publique début mai. Le 24 août, le référendum est fixé à la date symbolique du 1er novembre. La version finale du projet est divulguée le 6 septembre à l’issue d’une réunion du Conseil des ministres.
Les principaux amendements
Parmi les principaux amendements proposés, le poste de Premier ministre reviendra à la force politique majoritaire au Parlement. Il est appelé Premier ministre en cas de majorité présidentielle, ou chef de gouvernement en cas de victoire de l’opposition aux législatives.
Le texte prévoit aussi la limitation du nombre de mandats de député (deux mandats), la constitutionnalisation du Hirak, l’impossibilité d’amender l’article 4 faisant de Tamazight une langue nationale et officielle, la possibilité pour l’ANP de participer à des opérations de maintien de la paix à l’étranger, une nouvelle composition du Conseil supérieur de la magistrature dans laquelle ne figure plus le ministre de la Justice, le remplacement du Conseil constitutionnel par une cour constitutionnelle, l’adoption du régime de déclaration pour la création d’associations ou de journaux écrits, la réparation des victimes de détention provisoire arbitraire…
Les pour et les contre
Les débats sur le projet de révision constitutionnelle n’ont pas induit une reconfiguration du paysage politique nationale. Les traditionnels partis proches du pouvoir soutiennent le projet sans réserves, les partis islamistes sont divisés (le MSP et le FJD ont appelé à voter ‘non’, le mouvement el Bina et El Islah font campagne pour le ‘oui’). Des figures du hirak et des partis de la mouvance démocratique (FFS, RCD, PT, etc) rejettent la démarche du pouvoir dans sa globalité et maintiennent leur revendication d’un processus constituant. D’autres comme Jil Jadid la soutiennent.
La campagne
La campagne pour le référendum du 1er novembre s’est ouverte officiellement le 7 octobre et devrait s’étaler jusqu’au 28 du mois. Elle est animée par des associations de la société civile et des principaux partis qui soutiennent le projet. Les partisans du non ne sont pas autorisés à animer des meetings.
Le 29 septembre, l’autorité électorale (Anie) a émis un arrêté limitant la participation à la campagne aux seuls partis politiques détenteurs d’un groupe parlementaire au niveau de l’une des Chambres du Parlement, les partis politiques détenteurs de 10 sièges entre les deux Chambres du Parlement, et les partis politiques détenteurs de sièges au sein des Assemblées populaires locales au niveau de 25 wilayas au minimum.