Près de 570.000 euros de salaire estimé par semaine, avant impôts… A l’instar de Manchester United, qui va faire du Chilien Alexis Sanchez le joueur le mieux payé de Premier League, le championnat anglais est-il devenu fou ? Loin de là, expliquent les experts.
Selon les estimations faites par la presse britannique, Sanchez va exploser les records. Avant lui, le joueur le mieux payé de Premier League était son futur coéquipier chez les Red Devils, le Français Paul Pogba, avec « seulement » 330.000 euros hebdomadaires estimés.
Une « misère » partagée avec les autres stars de Manchester United comme le Belge Romelu Lukaku (285.000 EUR par semaine) où même Zlatan Ibrahimovic (250.000 EUR par semaine)…
. Pourquoi les clubs anglais dépensent-ils autant?
Parce qu’ils le peuvent! Avec l’accord TV actuel, signé jusqu’en 2019, chaque club empoche 135 millions d’euros par saison, rappelle à l’AFP Rob Wilson, économiste du football à l’université Sheffield Hallam. Ils « s’attendent à ce que les revenus TV augmentent », reconnaît le Pr Tom Cannon, même si selon ce spécialiste de la gestion des clubs à l’université de Liverpool, c’est surtout la crainte de la relégation qui soutient la flambée de janvier.
« Le coût de la relégation, malgré les paiements parachutes pour aider les équipes reléguées, est énorme », assure-t-il. « Cette peur remonte assez haut dans le classement. Une équipe comme Everton est 9e, mais elle vient seulement de s’éloigner de la zone rouge. » Et flambe pour se renforcer.
Si Rob Wilson plaide que, avec les recettes commerciales, les sponsors et la billetterie, « les clubs de Premier League sont parmi les plus importants générateurs de revenus en Europe », ils restent très dépendants de l’argent de la télévision: « Au moins 70% de leurs revenus totaux », assure-t-il.
. Cette frénésie peut-elle continuer?
Tant que les droits TV sont aussi généreux… Les droits domestiques, qui seront en partie négociés dans les prochains mois, ne sont pas prêts de baisser pour la période 2019-2022 avec l’arrivée attendues des grandes entreprises internet (Amazon, Netflix, Facebook…). Selon le Telegraph, Amazon est même prêt à formuler une offre dès le premier round d’enchères de février.
Au Royaume-Uni, le principal diffuseur Sky, qui a dépensé 4,2 milliards de livres (4,7 Mds EUR) lors du présent accord, ne peut laisser filer le football, crucial pour conserver ses abonnés. Dans le giron de Disney, après le rachat récent de la 21st Century Fox, Sky devrait avoir encore plus de moyens pour lutter avec les colosses internet. La stratégie affichée de Disney est de se transformer en un géant des médias pouvant concurrencer Netflix, Amazon, Facebook ou encore Apple.
La Premier League est aussi compétitive à l’international. « Cette exposition à travers le globe séduit les multinationales ou les grandes entreprises asiatiques, comme on peut le constater en observant les sponsors maillots. « Beaucoup de contrats ne peuvent se justifier sur le plan domestique », explique Tom Cannon.
. Peut-on s’attendre à d’autres méga-transferts?
« On demande maintenant 25-30 millions de livres pour un joueur qui en valait 15 millions il y a deux ans. La conséquence, ce que les joueurs d’élite vont valoir encore plus », observe Rob Wilson. Et puis « les clubs anglais paient souvent des montants gonflés » par les clubs du continent. Quant aux intermédiaires des joueurs et des clubs, ils se frottent les mains devant les indemnités juteuses.
« La phase de groupes de la Ligue des champions, avec les sponsors, la billetterie, rapporte environ 70 millions d’euros », rappelle aussi Tom Cannon pour justifier la frénésie du « Big Six » (Manchester City, Manchester United, Arsenal, Tottenham, Chelsea, Liverpool).
« Chaque tour rapporte ensuite entre 17 et 23 millions. Une équipe anglaise qui gagnerait la C1 serait certaine d’empocher entre 120 et 150 millions d’euros ». Si le défenseur néerlandais Virgil Van Dijk, recruté 84 millions d’euros fin décembre par Liverpool, aide le club « à atteindre les quarts, son transfert est payé ».
Bémol néanmoins: les instances du football s’inquiètent de l’inflation des indemnités de mutation. La semaine passée, le journal Le Parisien a révélé que l’UEFA envisageait de mettre en place, dès la saison prochaine, une limitation de la différence entre achats et dépenses de joueurs à -100 millions d’euros sur une saison (si un club achète pour 200 M d’euros de joueurs, il doit vendre pour au moins 100 M EUR sur une saison), et une limitation, voire une interdiction du nombre de prêts.