Sur le portail web des services du Premier ministre, la page qui affiche habituellement la composition du gouvernement est bien vide. Seuls les photos et les noms de Noureddine Bedoui, Premier ministre, et de Ramtane Lamamra, vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères y sont affichés alors qu’en temps normal, elle contient jusqu’à une trentaine de portraits et de noms de ministres.
Ahmed Ouyahia a remis sa démission au président Bouteflika le lundi 11 mars. Noureddine Bedoui et Ramtane Lamamra ont été désignés à la tête d’un nouveau gouvernement dont ils sont, 13 jours plus tard, les seuls membres.
Pour désigner les ministres de ce gouvernement dit « de transition », Noureddine Bedoui a programmé à la hâte une série de rencontres avec des personnalités politiques et des représentants de la société civile. Mais la plupart des interlocuteurs qu’il a souhaité rencontrer ont décliné. Le dimanche 17 mars, ce ne sont pas moins de 13 syndicats, notamment ceux de l’éducation et de la santé qui ont décliné des invitations à des rencontres avec le Premier ministre.
Les syndicats autonomes et personnalités politiques de l’opposition veulent un gouvernement qui ne soit pas formé par Bedoui, une figure du pouvoir. « Nous ne discuterons pas avec les représentants du pouvoir », a déclaré à TSA un syndicaliste qui a décliné lui aussi une invitation à rencontrer Bedoui au palais du gouvernement à la mi-mars.
Le nouveau Premier ministre peine également à trouver des ministres dans les partis proches du pouvoir. Des figures politiques, syndicales et associatives, qui ont fait partie du pouvoir ou ont gravité autour de lui ces vingt dernières années, ont, selon des sources concordantes, décliné des propositions de faire partie de ce gouvernement. Etant conscients que l’opinion voyant la formation d’un gouvernement de transition sous l’égide du pouvoir comme une manœuvre de contournement de sa volonté de changement radical, peu sont ceux qui acceptent d’être les futures cibles des slogans des Algériens lors des prochaines manifestations. Des hésitations d’autant plus nombreuses que le jeu n’en vaut pas la chandelle puisque le gouvernement Bedoui risque d’être éphémère.
Sur les réseaux sociaux, les difficultés rencontrées par le Premier ministre à former son gouvernement sont le sujet de nombreuses blagues. « Si vous recevez un appel anonyme, ne décrochez surtout pas, c’est peut-être Bedoui qui va vous proposer un poste de ministre », blaguent les internautes algériens, ou encore, « Noureddine Bedoui sollicite l’Anem (l’agence nationale de l’emploi) pour recruter des ministres ».