La Tunisie ne se porte pas bien. La monnaie locale a chuté et la grogne sociale prend de l’ampleur, six ans après la révolution qui a emporté le dictateur Ben Ali. Jeudi, des milliers de personnes ont manifesté dans plusieurs régions. À Kef, près de la frontière algérienne, les manifestants ont répondu à l’appel de la société civile pour protester contre la marginalisation de leur région et réclamer un développement plus équitable, selon les médias. « La région du Kef est marginalisée par le pouvoir central depuis l’indépendance. Elle a été ignorée par tous les gouvernements qui se sont succédé après la révolution, et Youssef Chahed (l’actuel Premier ministre, NDLR) a fait la même chose », a déclaré à l’AFP Kamel Saihi, secrétaire général adjoint du bureau régional de l’UGTT (Union générale des travailleurs tunisiens), selon les médias.
La ville de 50.000 habitants a été paralysée par une grève générale. Aucun incident avec les forces de l’ordre n’a été enregistré.
À l’origine des protestations, des rumeurs sur la délocalisation d’une usine de câble automobile de Hammamet vers une région côtière, ce qui n’a pas plu aux habitants de Kef. Et ces derniers ne sont les plus seuls à descendre dans la rue pour exprimer leur mécontentement. Depuis le début du mois d’avril, la Tunisie connaît d’importants mouvements sociaux notamment dans les villes périphériques comme Tataouine et Kairouan.
Le dinar tunisien à son plus bas historique
La montée en puissance des revendications sociales intervient dans un contexte économique difficile pour la Tunisie. L’Utica, principale organisation patronale locale, s’est inquiétée de la dévaluation rapide dinar et demandé au gouvernement à intervenir face à ce « grand danger » pour l’économie du pays, déjà fragilisée, selon les médias tunisiens. En deux ans, la monnaie locale a perdu près de 25% de sa valeur par rapport à l’euro. La monnaie unique européenne est passé de deux dinars tunisiens (TND) à 2,55 TND cette semaine, son plus bas historique.
Mardi, la ministre des Finances, Lamia Zribi, a expliqué la faiblesse du dinar par un creusement de plus en plus inquiétant du déficit commercial de la Tunisie, qui a atteint 2,5 milliards de dinars (près d’un milliard EUR) à fin février contre 1,35 md (520 millions EUR) il y a un an, précise L’Orient le jour. Le gouvernement a nié que la dévaluation du dinar était liée à une demande du FMI, qui s’apprête à octroyer à la Tunisie un prêt de 300 millions de dollars. « Lors des négociations avec le FMI, concernant la politique monétaire et de change à mener à court et moyen terme, il a été question d’aligner le dinar sur ses fondamentaux macroéconomiques. Cela ne voudrait pas dire, et en aucun cas, une dévaluation du dinar car on est plus en régime de change fixe », a assuré Toufik Rajhi, conseiller du Premier ministre tunisien à Africanmanager.