Les relations algéro-tunisiennes ont beau être au top, Moncef Marzouki trouve toujours le moyen de déclencher la polémique par des propos pas très amènes à l’égard de l’Algérie.
C’est ce que l’ancien président du pays voisin vient encore de faire cette semaine, au moment où les rapports entre les deux pays connaissent une symbiose telle que même le partage des quotas du vaccin anti-Covid acquis par l’Algérie est envisagé.
La nouvelle sortie de Marzouki suscite la réprobation jusque parmi ses alliés politiques. Qu’a-t-il donc dit ? Dans une interview à une chaîne du Golfe, le premier chef d’État tunisien post-révolution a laissé entendre que l’Algérie a joué un rôle néfaste durant la révolution du Jasmin en 2010-2011, qui a mis fin au régime du dictateur Ben Ali.
« Les autorités algériennes ont combattu la révolution tunisienne et lui ont été hostiles pendant ses premières années. Ce qu’a enduré la révolution tunisienne de la part de l’Algérie n’est pas moindre que ce que lui ont fait subir les Émiratis, même si c’était d’une manière différente », déclare-t-il à la chaîne satellitaire Al Khaleej.
Marzouki ajoute qu’il avait rencontré le président algérien de l’époque Abdelaziz Bouteflika pour le rassurer que la révolution tunisienne était une affaire interne.
Ce qui n’est pas totalement faux. Abdelaziz Bouteflika et son régime déchu s’étaient rangés du côté de tous les dictateurs arabes contestés par leurs peuples, de Benali à Bachar al Asssad en passant par Kadhafi. C’est un secret de polichinelle.
Marzouki, président de la Tunisie entre 2011 et 2014, n’a jamais caché son inimitié pour les autorités algériennes depuis qu’il a quitté la présidence. Bien que n’exerçant aucune fonction officielle, le statut d’ancien chef de l’État de Marzouki confère à ses propos un certain poids susceptible d’envenimer les relations entre les deux pays.
Le gouvernement algérien évite à chaque fois de lui répondre, de même que les autorités tunisiennes ne s’empressent pas de commenter ses déclarations.
Ses propos sur l’Algérie ont à chaque fois provoqué des polémiques sur les réseaux sociaux.
En Tunisie, cette fois, la réaction est venue de la partie de laquelle elle était le moins attendue, le mouvement Ennahdha, dont Marzouki est supposé être proche politiquement.
Le mouvement islamiste remet les choses à leur endroit, rappelant « les positions de l’Algérie en faveur de la Tunisie » et son « soutien » à l’expérience démocratique dans ce pays, et exprime son « rejet » de ces déclarations qu’il juge « offensantes » à l’égard de l’Algérie, « précipitées », « irresponsables » et « contre-productives ».
Sur les réseaux sociaux, Marzouki ne tarde pas à réagir et tente d’expliquer qu’il s’en est pris aux autorités algériennes et non à l’Algérie et son peuple. « J’ai personnellement hissé le drapeau algérien sur le palais de Carthage le 1er novembre 2014 », rappelle-t-il, assurant même que son propre père a combattu pour l’indépendance de l’Algérie.
« Si on avait dit que je me suis attaqué au régime algérien qui nous a porté atteinte, oui, il nous a porté atteinte ainsi qu’au peuple algérien, en tant que partie du système des régimes arabes corrompus, j’aurais pris cela pour des éloges », assume-t-il.
Les contradictions de Moncef Marzouki
Si l’ancien président tunisien se présente comme le chantre de la démocratisation du Maghreb, étant lui-même un farouche opposant au régime de Benali, son discours n’est pas exempt d’incohérences, relèvent de nombreux observateurs.
Tout récemment, sur la question du Sahara occidental, il a franchement pris position pour les thèses du Maroc qui pourtant, rentreraient bien dans la case du « système des régimes arabes corrompus » qu’il dénonce, imputant à l’Algérie la responsabilité du blocage de l’édification maghrébine. Ce qui n’est pas le cas puisque le Maroc fait tout pour saboter le projet de l’Union du Maghreb.
En Tunisie, Marzouki n’est pas l’unique ancien haut responsable à tenir un discours hostile vis-à-vis de l’Algérie. En décembre dernier, l’ancien chef de la diplomatie tunisienne, Ahmed Ounis, avait accusé les autorités algériennes d’être « impliquées dans la division du Maghreb » et d’avoir « poussé le Maroc à normaliser ses relations avec Israël ».
« Les excellentes relations avec l’Algérie ne peuvent être perturbées par des positions officieuses, qui n’engagent en rien la Tunisie et ne représentent que leurs auteurs », avait réagi le ministère tunisien des Affaires étrangères.