Amnesty International a accusé dans un rapport publié jeudi les autorités turques d’avoir imposé un « climat de peur glaçant » après le putsch manqué de 2016, en s’en prenant notamment aux défenseurs des droits de l’homme.
« Un climat de peur glaçant se propage dans la société turque alors que le gouvernement continue d’utiliser l’état d’urgence pour réduire l’espace réservé aux opinions dissidentes ou alternatives », affirme le rapport.
L’état d’urgence a été instauré en juillet 2016, quelques jours après une tentative de putsch menée par des militaires factieux, et a été sans cesse renouvelé depuis.
Dans ce cadre, des purges sans précédent ont été menées, au cours desquelles plus de 50.000 personnes ont été arrêtées, et plus de 140.000 limogées ou suspendues.
Outre les putschistes présumés, ces purges ont été étendues aux milieux prokurdes et d’opposition, visant des juges, des enseignants ou des journalistes.
« Les autorités turques ont entrepris, de manière délibérée et méthodique, de démanteler la société civile, d’enfermer les défenseurs des droits humains, de fermer des organisations et de créer un climat de peur étouffant », selon Gauri van Gulik, directrice du programme Europe d’Amnesty International, citée dans un communiqué.
D’après Amnesty, plus de 1.300 associations et 180 médias ont également été fermés.
Ankara impute la tentative de coup d’Etat au prédicateur Fethullah Gülen, installé aux Etats-Unis et qui nie toute implication.
« La répression soutenue et croissante entrave le travail essentiel des défenseurs des droits humains en Turquie et plonge une grande partie de la société dans un état de peur constante », affirme Amnesty dans son communiqué.
Le rapport présente de nombreux cas, comme celui du président d’Amnesty en Turquie, Taner Kiliç, en détention depuis juin 2017, ou du philanthrope Osman Kavala, détenu depuis octobre dernier, tous deux accusés de liens avec le putsch manqué, ce qu’ils nient.
Pour Amnesty, le travail des défenseurs des droits de l’homme a « été piétiné » par les mesures prises sous l’état d’urgence.
Le rapport se penche également sur la situation des organisations de défense des droits de la communauté LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes), dont les défenseurs sont « poussés vers la clandestinité » selon Amnesty.
Plusieurs rassemblements LGBTI ont été interdits ces derniers mois en Turquie, le gouvernorat d’Ankara ayant même annoncé en novembre l’interdiction « jusqu’à nouvel ordre » de tous les événements culturels organisés par la communauté LGBTI.