De mystérieux appels à boycotter des marques de produits de grande consommation ont été massivement relayés ces derniers jours sur les réseaux sociaux marocains, suscitant de multiples réactions et des interrogations.
Le mot d’ordre lancé anonymement dénonce “la cherté de la vie”, le “monopole” de certaines entreprises et appelle à “baisser les prix” des produits de grande consommation.
Rien n’explique pourquoi trois marques sont visées en particulier par ce boycott, si ce n’est qu’elles détiennent des parts de marché conséquentes: Afriquia, premier distributeur de carburants au Maroc, dont l’actionnaire majoritaire est l’homme d’affaires et ministre de l’Agriculture Aziz Akhannouch, les eaux minérales de Sidi Ali du géant marocain Holmarcom, et les produits laitiers de Centrale Danone, filiale du groupe français éponyme.
Une dizaine de pages Facebook, suivies par des centaines de milliers de personnes, ont massivement relayé le message et les internautes sont nombreux à partager une photomontage des trois marques frappées d’une croix, accompagné du slogan “nous boycottons”.
“Il vaut mieux boycotter que manifester”, proclame un message diffusé sur une page Facebook. “Notre seule motivation est de défendre les intérêts du peuple contre la cherté de la vie”, clame une autre publication Facebook diffusée de façon virale.
Alors que les initiateurs du boycott restent dans l’ombre, les responsables commencent à réagir. “La filière laitière emploie 470.000 personnes (…), les enjeux sont réels, ce n’est pas un jeu d’enfants”, a déclaré mercredi le ministre Aziz Akhannouch, première fortune privée du pays, en marge du salon de l’Agriculture.
Pour illustrer ses propos, il a publiquement bu un verre de lait.
La veille, le ministre de l’Economie et des finances Mohamed Boussaid avait fustigé au Parlement les “écervelés” à l’origine du boycott, appelant à défendre les entreprises marocaines.
Un responsable de Centrale Danone, lui, est allé jusqu’à évoquer une “atteinte aux intérêts de la Nation à travers le boycott de marques produits au Maroc”, mercredi en marge du salon de l’Agriculture.
La presse locale souligne le caractère “mystérieux” ou “peu cohérent” de ce boycott qui “embarrasse de grandes entreprises”.
Des médias évoquent la piste d’un “règlement de compte politique” qui ciblerait M. Akhannouch, patron du parti libéral RNI, et qui occupe le poste de ministre de l’Agriculture depuis 2007.
L’impact réel du boycott reste difficile à évaluer. Sollicitées par l’AFP, les trois entreprises n’ont pas donné suite. Mais, à Rabat, plusieurs commerçants interrogés par l’AFP ont constaté que les ventes de l’eau minérale Sidi Ali et du lait distribué par Danone connaissent depuis deux jours des baisses parfois substantielles.