Décidément, les polémiques n’en finissent pas autour du baccalauréat en Algérie. Beaucoup a été dit sur cette session 2022.
Le recul du taux de réussite, de 61,17 % en 2021 à 58,75 % est perçu comme un échec, quelque part par la faute des autorités qui, depuis plusieurs années, privilégient la quantité au détriment de la qualité, les gros chiffres étant considérés comme la preuve de l’efficacité de l’action gouvernementale et de l’institution éducative.
Les critiques ont aussi ciblé la décision des autorités de permettre le rachat des candidats n’ayant pas pu avoir une note de 10/20. Le seuil du rachat est fixé cette année à 9,5/20.
Le ministère de l’Education nationale a justifié sa décision par la perturbation des trois dernières années scolaires par les arrêts et les réaménagements imposés par la crise sanitaire de Covid-19, mais les syndicats de l’éducation et les spécialistes de pédagogie ont crié à l’atteinte à la crédibilité du plus important examen du cursus scolaire.
En Algérie, le Bac est quasiment l’unique porte d’accès aux études supérieures et il est donc primordial de préserver sa crédibilité.
C’est ce souci d’ailleurs qui amène chaque année les autorités à prendre des mesures draconiennes pour éviter la triche dans les centres d’examen, allant jusqu’à couper Internet pour tout le pays pendant les cinq jours que durent les épreuves, soit une semaine ouvrable pleine.
Après l’annonce des résultats samedi 16 juillet, place à la récompense des meilleurs lauréats. En attendant la traditionnelle cérémonie qu’organise le président de la République en l’honneur des meilleurs bacheliers, les autorités locales se chargent de récompenser les premiers au niveau de leur wilaya ou commune, en présence de tous les responsables locaux et des correspondants des chaînes de télévision.
S’afficher aux côtés d’un jeune élève qui vient d’obtenir son Bac avec une moyenne de 18 ou 19/20, est une manière de s’approprier une partie du mérite dans cette réussite, et c’est de bonne guerre pour un responsable politique soucieux de son image et de sa carrière.
Sur les réseaux sociaux, on signale toutefois que certains responsables vont un peu loin dans la récupération politicienne. En guise de récompense au meilleur bachelier de leur circonscription, ils offrent en effet une omra aux Lieux-Saints de l’islam.
Récupération politicienne ?
C’est par exemple le cas à Barika, dans la wilaya de Batna, où la meilleure lauréate au niveau national, avec 19,55/20, a bénéficié d’une omra pour elle et ses parents et d’un chèque de 100.000 dinars.
La cérémonie largement partagée sur les réseaux sociaux a fait réagir le journaliste Abed Charef. « La jeune fille est une victime dans cette histoire. Elle est brillante, surdouée, elle a besoin d’un environnement qui fasse sauter tous les verrous, tous les blocages. Lui offrir une omra, c’est l’enfermer dans une logique, même pas religieuse. Il s’agit plutôt de bigoterie. Un maire, un wali, qui offre une omra, ce n’est pas sans signification. Le cadeau offert porte une signification lourde, il dénote parfois une appartenance politique, idéologique ou partisane », écrit-il sur Facebook et Twitter.
Traditionnellement, les meilleurs bacheliers étaient envoyés dans les meilleures universités du monde. Les bourses s’élevaient à 10 000 dollars pour une centaine d’étudiants qui s’inscrivaient dans les universités occidentales mais aussi en Russie. Mais les bourses d’études ont été supprimées en 2014, sans doute parce que la plupart des bacheliers ainsi envoyés à l’étranger ne revenaient pas après leurs études.