Le professeur français Didier Raoult n’est plus seul. De plus en plus de voix s’élèvent en France pour défendre la généralisation de la chloroquine dont il a été le premier défenseur.
Faute de traitement et encore moins de vaccin (qui ne serait disponible qu’au début de l’année prochaine dans le meilleur des cas), de nombreux pays, dont l’Algérie, ont opté pour l’hydroxychloroquine, un antipaludique vieux d’au moins cinquante ans.
En France, l’un des pays les plus touchés par le Covid-19, les autorités sanitaires ont longtemps tergiversé avant d’autoriser, le 25 mars, l’usage de médicament comme traitement contre la nouvelle maladie. Mais un usage fortement encadré. Le Pr Raoult, directeur de l’Institut Méditerranéen à Marseille, a beau multiplier les études pour prouver son efficacité, une partie de la communauté scientifique est restée sceptique.
Une polémique est alors déclenchée. Mais les défenseurs du médecin marseillais se font de plus en plus nombreux, au fur et à mesure que progresse la pandémie (plus de 8000 morts sont déjà recensés en France, 65 000 dans le monde).
Une tribune signée par trois professeurs émérites
Ce lundi 6 avril, trois professeurs émérites ont publié une tribune dans le Figaro pour plaider l’usage et la généralisation de l’hydroxychloroquine. Fabien Calvo, Jean-Luc Harousseau et Dominique Maraninchi, respectivement ancien directeur scientifique de l’Institut national du cancer (INCa), ancien président de la Haute autorité de santé (HAS) et ancien directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), apportent leur soutien au Pr Raoult.
Ils mettent en avant « l’absence de toute autre possibilité dans une crise sanitaire sans précédent depuis un siècle » écrit le trio. Sans nier la controverse qui agite le monde scientifique sur l’intérêt de l’association hydroxychloroquine (HCQ) – azithromycine, ils rappellent que l’équipe du Pr Raoult vient de publier les résultats d’une nouvelle cohorte de 80 patients ainsi traités au diagnostic, avec des disparitions très rapides de la charge virale chez 78 d’entre eux, un patient de 86 ans étant décédé et un autre de 74 ans étant dans un état grave.
Les trois pointures médicales rappellent en outre que dans ce type de maladie virale susceptible d’entraîner une détresse respiratoire, « la persistance du virus devient peu importante dans l’évolution de la détresse respiratoire lorsque la barrière pulmonaire est atteinte, en raison des complications inflammatoires majeures ».
Les politiques s’en mêlent
Ils reconnaissent un point fort à la dernière étude du Pr Didier Raoult : la diminution très rapide de la charge virale avec négativation de celle-ci dans plus de 90% des cas en moins de 8 jours de traitement, ce qui permettrait d’éviter les formes graves nécessitant le passage en réanimation. Ils plaident donc pour une stratégie de traitement précoce, avant la survenue des complications respiratoires.
Même les politiques s’y mettent. Le président de France Debout, Nicolas Dupont-Aignan, dénonce les tergiversations des autorités sanitaires et qualifie « chaque jour perdu » de « crime ».
« Je ne suis pas pour une prescription générale de la Chloroquine, je ne suis pas médecin. Je suis pour que les médecins qui connaissent ce médicament et qui veulent le prescrire, parce qu’ils estiment que c’est un bon moyen, puissent le faire en pharmacie, avec ordonnance. Chaque jour perdu est un crime. Des dizaines de professeurs de médecine le réclament. Personne ne comprend pourquoi ce traitement pas cher, expérimenté depuis 50 ans dans le monde sur des millions, des dizaines, des centaines de millions de personnes n’est pas laissé à l’autorisation des médecins qui sont des gens compétents », a déclaré l’homme politique dans une émission radiophonique.
Tensions à la Maison Blanche
Aux États-Unis, la chloroquine a un défenseur de longue date en la personne de Donald Trump. Mais les propos publics du président américain commencent à susciter des tensions au sein de l’équipe dirigeante.
Selon CNN, citée ce lundi par CNews, un désaccord particulièrement houleux s’est produit, le week-end dernier, sur l’efficacité du médicament, entre des membres du groupe de travail de la Maison Blanche.
Une partie des experts, menée par le docteur Anthony Faucy, reproche à Donald Trump de vanter les mérites de la chloroquine, ajoute la même source.
«Il pourrait y avoir des morts, a répondu à CNN le docteur Patrice Harris, président de l’Association médicale américaine (AMA), la première association de médecins des États-Unis. Il s’agit d’un nouveau virus, et nous ne devons donc pas promouvoir un médicament qui n’a pas été testé et approuvé par la Food and Drug Administration – l’Administration américaine des médicaments et des denrées alimentaires-».
Trump a déclaré ce week-end avoir eu « l’approbation rapide » de cette administration concernant l’utilisation de la chloroquine. Une affirmation démentie par CNN.
En Algérie, le protocole hydroxychloroquine a été adopté par la commission scientifique du ministère de la Santé dès le 23 mars. Au 6 avril, 626 patients ont reçu le traitement et les résultats ont été qualifiés d’ « encourageants » par divers intervenants mais aucune statistique officielle n’a encore été publiée.