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Vaccination anti-Covid : pourquoi l’Algérie doit faire plus vite

Vaccination anti-Covid : pourquoi l’Algérie doit faire plus vite

La vaccination de masse anti-Covid 19 en Algérie n’a toujours pas réellement démarrée, ce qui inquiète sérieusement les spécialistes de santé publique alors que le gouvernement étrangement le silence.

La première dose a été inoculée en grande pompe à Blida le 30 janvier. S’ensuivirent beaucoup d’images de responsables qui se font vacciner devant les caméras, et puis presque plus rien. Alors que certains spécialistes estimaient qu’il fallait au moins six mois pour entamer la vaccination, le président de la République a ordonné, en décembre, alors qu’il était toujours hospitalisé en Allemagne, au gouvernement d’acquérir rapidement le vaccin pour lancer la vaccination avant la fin du premier mois de l’année.

Ce qui a été fait. Le 29 janvier, les premières doses du vaccin russe Spoutnik-V arrivent à Alger et le lendemain, la vaccination est entamée symboliquement à partir de Blida, première ville algérienne à être sérieusement touchée par la pandémie en février-mars 2020.

Même les plus réalistes rentreront dans les rangs et très peu de voix ont contesté l’objectif répété par les responsables à tous les niveaux : vacciner au moins 70 % de la population en 2021.

Le discours ambiant était à l’optimisme, certains mettant en avant les longues traditions de l’Algérie dans la vaccination, donc la disponibilité des infrastructures et du personnel nécessaire, d’autres annonçant chaque jour des négociations et des commandes fermes auprès des laboratoires mondiaux qui ont mis des vaccins sur le marché.

Près de deux mois après le lancement symbolique de la campagne, le bilan est plutôt très en deçà des promesses et il est difficile de croire l’affirmation de Dr Fourar, porte-parole du comité scientifique du ministère de la Santé pour qui « la campagne se poursuit et se déroule le plus normalement possible ».

À fin mars, l’Algérie devrait avoir vacciné quatre millions de ses habitants. C’est l’objectif annoncé dans les jours qui avaient suivi la réception du premier lot de vaccin.

Or, à moins d’un miracle dans les jours à venir, l’objectif sera très loin d’être atteint. À deux semaines de l’échéance, aucun bilan chiffré de la vaccination n’a été dressé, mais il y a un indicateur qui ne trompe pas : le nombre de doses réceptionnées est insignifiant par rapport aux quantités attendues.

| Lire aussi : Vaccination, immunité collective, AstraZeneca : Entretien avec Bekkat Berkani

Le passeport vaccinal, l’autre enjeu

En tout et pour tout, l’Algérie a reçu 300 000 doses réparties entre le vaccin russe Spoutnik-V, le Chinois de Sinopharm et l’anglo-suédois Astra-Zeneca. De quoi prendre en charge 150 000 personnes, à raison de deux doses par individuel.

On est loin des 8 millions de doses nécessaires pour 4 millions de citoyens dans un premier temps, et très loin de l’objectif final de vacciner 70 % de la population en 2021.

Et devant l’opacité qui règne de nouveau sur la question, on n’est même pas sûr que les 300 000 doses acquises aient été toutes utilisées, au vu notamment de tout ce qui se dit à propos de l’efficacité et des effets du vaccin britannique.

Plusieurs spécialistes ont en effet appelé à le suspendre. Selon le Dr Fourar, 200 000 doses ont été « distribuées », sans donner de détails. Le gouvernement garde le silence et n’a fourni aucun bilan chiffré.

On sait par contre que des professionnels de la santé se sont publiquement plaints de n’avoir pas été vaccinés et dénoncé les quantités dérisoires affectées à chaque service.

Entre les personnes âgées, les malades chroniques et les personnels de santé, cibles prioritaires de la campagne, 300 000 doses ne peuvent pas suffire.

« Il faut faire plus d’efforts pour ramener les quantités (de vaccins) qu’il faut et de manière régulière », réclame le Dr Lyes Merabet, président du syndicat national des praticiens de santé publique, mettant en garde contre le risque de « désensibilisation » des citoyens et du personnel de santé.

Une appréhension que confirment les chiffres. Au 16 mars, seuls 20 000 citoyens se sont inscrits sur la plateforme en ligne mise par le ministère de la Santé à la disposition de ceux qui souhaitent se faire vacciner.

Le Pr Sanhadji tire carrément la sonnette d’alarme quant à un autre risque, celui de créer des mutants locaux du virus. « L’idéal, c’est de faire vite, vite, vite (…) Il n’y a pas pire que de vacciner à petites fractions. Dès que vous commencez à toucher doucement le virus avec la vaccination, il va essayer de résister, il va muter et devenir variant. » Parole de spécialiste.

Comme le souligne Lyes Merabet, les ratés de la vaccination sont contrebalancés par la stabilisation de la situation avec une baisse constante du nombre de nouveaux cas quotidiens, et c’est tant mieux.

Mais quand bien même il n’y aura pas de nouvelle dégradation, sans vaccination de masse, il subsistera un gros problème pour les Algériens : il leur sera difficile de voyager dans les mois à venir si les pays de destination exigent un passeport vaccinal.

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