Lorsque, le 22 février dernier, un vendredi, les Algériens étaient sortis dans la rue dire non au projet de présidence à vie de Abdelaziz Bouteflika, très peu avaient prédit que l’on parlera un jour de « quarantième vendredi » de contestation.
Neuf mois après, les Algériens s’apprêtent pourtant à marcher de nouveau, comme ils le font sans discontinuer chaque semaine depuis cette date charnière de l’histoire contemporaine du pays.
Ce vendredi 22 novembre verra en effet le hirak populaire boucler son neuvième mois. Une longévité qui exprime d’abord la détermination de la rue à faire aboutir la revendication qui a immédiatement suivi la tombée à l’eau du cinquième mandat et la démission de Bouteflika, le 2 avril, soit un changement radical de système.
Elle traduit aussi l’obstination de ce dernier à imposer sa solution. La solution en ce moment pour le pouvoir c’est l’élection présidentielle, prévue dans trois semaines, et que les manifestants du hirak rejettent.
Les cinq candidats en lice ont entamé les sorties sur le terrain dimanche dernier et ce vendredi sera justement le premier depuis le début de la campagne électorale.
Mardi, les étudiants en avaient fait le thème central de leur marche et il n’y a pas de doute qu’il en sera de même lors de la journée de grande mobilisation hebdomadaire.
Le début de la campagne fait que le hirak ne soit plus bihebdomadaire, mais quasiment quotidien. Des actions sporadiques sont signalées tout au long de la semaine partout où se montrent les candidats ou les partisans de l’élection.
Des marches nocturnes ont même lieu dans de nombreuses villes. Contrairement aux derniers mois et semaines, les manifestants n’attendent plus le vendredi ou le mardi pour exprimer de vive voix ou sur des pancartes les avis qu’ils partagent pendant la semaine sur les réseaux sociaux.
La contestation se fait, pour ainsi dire, en temps réel, et s’intensifie. La répression aussi. De nombreux activistes ont été arrêtés, certains placés en détention provisoire et d’autres condamnés avec une célérité inhabituelle.
Comme ces quatre militants de Tlemcen qui ont écopé lundi de 18 mois de prison ferme, 24 heures seulement après avoir tenté de chahuter un meeting du candidat Ali Benflis, au premier jour de la campagne.
A El Oued, un manifestant a été condamné à deux ans de prison ferme pour les mêmes griefs, et un autre à six mois de prison avec sursis. A Alger, des dizaines d’activistes ont été interpellés mercredi soir au cours d’un rassemblement nocturne et huit d’entre eux ont été placés ce jeudi en détention provisoire.
La même mesure a été prononcée à l’encontre de l’activiste Brahime Lalami à Bordj Bou Arréridj. La thématique des marches de ce vendredi 40 ne devrait donc pas porter sur d’autres points que le rejet de la présidentielle qui s’approche, les candidats et leur début de campagne difficile, ainsi que tous ces jeunes venus grossir les contingents des détenus du hirak.
Quant à la mobilisation, elle devrait être de nouveau importante après la démonstration du vendredi 39 qui a vu les manifestants marcher sous un déluge de pluie à Alger et dans quasiment toutes les wilayas.
Le hirak avait définitivement confirmé son retour en force après la marche historique du 1er novembre, considérée par beaucoup comme la plus imposante depuis février.