J-1 avant la grande marche populaire prévue ce vendredi 1er novembre à Alger, voulue par les animateurs du hirak comme la jonction de deux grandes révolutions du peuple algérien, celle de 1954 qui a libéré le pays du colonialisme et celle de 2019 qui le propulsera vers la démocratie.
Les observateurs s’attendent à une mobilisation historique qui se rapprocherait de celle des débuts du mouvement en mars-avril. Les préparatifs aux quatre coins du pays vont bon train et la sensibilisation sur les réseaux sociaux bat son plein depuis plusieurs jours.
Tout au long de la semaine, des vidéos ont été partagées sur les principales pages soutenant le hirak populaire avec pour mot d’ordre, rallier la capitale par tous les moyens. Les barrages de gendarmerie ont commencé à filtrer le passage sur les principaux axes routiers dès mercredi en fin de journée et devraient se faire plus hermétiques ce jeudi soir et vendredi matin, mais cela ne devrait pas décourager les manifestants.
Le blocage des accès à la capitale avant les marches n’est en effet pas une nouveauté. Il est devenu systématique depuis le début de l’été, mais les manifestations dans le centre d’Alger ont continué à drainer des foules nombreuses. La mobilisation est même montée en cadence dès la rentrée, particulièrement depuis l’acte 33 du hirak, vendredi 20 septembre, survenu deux jours après des menaces fermes de verbaliser et de saisir les véhicules transportant les manifestants.
Les Algérois étaient sortis en masse et beaucoup de citoyens ont rallié la capitale par divers moyens. Les images de jeunes marchant le long des chemins de fer ou s’entassant dans des barques étaient sans doute plus expressives de la détermination des Algériens que la plus impressionnante des marches.
Les caprices du calendrier ont fait qu’en cette année de révolution, deux dates marquantes de l’histoire du pays, le 5 juillet, jour de l’indépendance, et donc le 1er novembre, anniversaire du déclenchement de la guerre de Libération, coïncident avec un vendredi.
Le 5 juillet dernier, avec moins d’appels et de sensibilisation que cette fois, une très forte mobilisation avait été enregistrée après un creux de plusieurs semaines dû à plusieurs facteurs, dont le mois de jeûne et la canicule estivale.
Si pour ce 1er novembre, les réseaux sociaux se sont enflammés et les animateurs insistent pour en faire une étape charnière dans le hirak populaire, c’est principalement à cause de l’échéance politique qui se rapproche. Contrairement au 5 juillet où le hirak avait déjà obtenu l’annulation de l’élection du 4 du même mois depuis plusieurs semaines, cette fois, la présidentielle du 12 décembre est maintenue avec beaucoup d’insistance et continue à constituer le principal point de discorde entre la rue et le pouvoir.
Ce dernier fonce droit devant, ignorant la farouche opposition d’au moins une grande partie de la société à la tenue du scrutin dans les conditions actuelles et avec des candidats qui ont presque tous été un jour au service de Bouteflika. La rue, de son côté, ne désespère pas de faire échouer le plan.
Le déni de la réalité, qui fait office de discours officiel depuis plusieurs mois, a jusque-là produit le juste contraire de l’effet escompté. Le dernier déni en date est celui affirmé en terre russe et qui veut que seuls « quelques éléments » continuent à sortir pour « brandir des slogans ».
« Je suis un élément du hirak », le slogan choisi pour la marche historique de ce 1er novembre est inspiré des propos tenus jeudi dernier par Abdelkader Bansalah. Une éventuelle très forte mobilisation ce vendredi sera peut-être insuffisante pour faire tomber à l’eau le projet de présidentielle, mais elle fera au moins voler en lambeaux le mythe entretenu d’un peuple heureux de pouvoir choisir son président le 12 décembre.