C’est la période que les vendeurs de vêtements pour enfants aiment le plus. Ils savent qu’ils vont mettre du beurre dans leurs épinards et exploser leur tiroir-caisse en l’espace de quelques jours à peine.
Les parents, eux, sont moins enthousiastes. Les dépenses du Ramadan ont mis leur portefeuille K.O et les voilà repartis pour un dernier tour de piste. Ils sillonnent les boutiques d’Alger à la recherche d’articles estampillés ‘bon rapport qualité prix’.
Hélas, force est de constater que les prix affichés frisent l’indécence. Des robes pour fillettes coûtent jusqu’à 9000 da, les chaussures autour de 5000 da. De leur côté, les commerçants se justifient en clamant que le prix de la devise a fortement augmenté et que les vêtements d’importation suivent forcément cette courbe ascendante.
Pris entre le marteau et l’enclume, les parents ne savent plus à quel saint se vouer. Certes, ils ont envie que leur progéniture soit sur son 31 le jour de l’Aid mais pas au point d’être contraints de manger du pain sec, le reste de l’année.
Alentours du marché Meissonnier dans le centre-ville de la capitale, face au portail de l’entrée supérieure de l’Hôpital Mustapha, un magasin de vêtements pour enfants.
Cette boutique grouille de mamans flanquées de leurs enfants. Les prix affichés donnent le tournis. Une pancarte avertit « Prix fixe. Veuillez ne pas insister ». Robes pour fillettes : entre 2400 da et 3800 da, ensembles tee-shirt et short en coton pour garçons : 3600 da.
Nabila (35 ans), quitte la caisse, le visage contrit. « Je viens de débourser 12 000 da pour mes deux fillettes et je n’ai pas encore acheté les chaussures. Vraiment, les prix sont en feu cette année. Ennar rahi chaala ! » se plaint-elle.
Rue Didouche Mourad, les boutiques d’habillement pour enfants sont prises d’assaut. Certains se contentent de regarder les étalages, d’autres se résignent à mettre la main à la poche.
L’enseigne Rabie et Nariman propose des ensembles au choix à 5000 da. Les robes pour fillettes s’affichent à 6900 da, et les ensembles pour garçons (polo et pantacourt) à 4500 da.
Sur le même trottoir, boutique Mayoral vend des vêtements et des chaussures d’importation (Zara et Mayoral). Les chaussures pour garçons coûtent 8200 da, les sandales pour fillettes 4200 da. Interrogé sur les prix, le patron réplique : « L’euro n’a pas cessé de grimper ces derniers temps. Je commercialise des articles venus d’Espagne. La qualité a un prix ».
Nid d’Ange, autre magasin qui a pignon sur rue. Ce commerce est spécialisé dans la vente de fringues fabriquées en Turquie. Robes d’été : 4000 da, pantacourt en jeans : 3000 da, ensemble tee-shirt bermuda : 3000 da, mini-jupe en jeans : 1600 da, jeans pour garons : 3500 da… Nous y croisons un couple accompagné de leurs trois bambins « Nous avons un budget de 10 000 da environ par enfant. Vu les prix pratiqués cette année, nous craignons de ne pas y arriver », s’inquiètent-ils.
Nous avons également observé une importante affluence du côté des friperies. Un papa n’a pas caché avoir recours à ces commerces de seconde main pour habiller ses petits « J’ai un modeste salaire et ne peux me permettre d’acheter des vêtements neufs. Les prix affichés en vitrine sont inaccessibles pour ma bourse ».
Respecter les traditions devient de plus en plus difficile, dans une société où le pouvoir d’achat ne cesse de dégringoler. Après les dépenses infligées au porte-monnaie pour honorer la maïda du Ramadan, le budget des ménages s’apprête à recevoir le coup de grâce avec l’achat des vêtements de l’Aïd. Seule consolation : le sourire des enfants et leur fierté de parader dans le quartier, le jour J.