Programme exceptionnel d’importation des viandes rouges et blanches, doublement de la production de sucre et d’huile…A moins de trois mois du mois de ramadan 2025, l’Algérie se prépare pour assurer la disponibilité de ces produits de large consommation afin d’éviter toute pénurie.
Lors de sa visite à la 32e Foire de la production algérienne d’Alger, le ministre du Commerce intérieur, Tayeb Zitouni, a dévoilé la mise en place d’un programme pour le mois de Ramadan 2025. Objectif, faire face à toute éventualité de hausse de prix et de risque de pénurie des produits de large consommation.
Le ministre a annoncé des mesures spéciales pour satisfaire la demande durant cette période dont « l’obligation pour les transformateurs de doubler la production de sucre blanc et d’huile alimentaire à partir de janvier 2025, l’augmentation du quota mensuel de lait en poudre et la prolongation du système de quotas supplémentaires pour le blé dur », selon l’agence APS.
Viandes : l’Algérie va recourir à l’importation
Durant le mois de Ramadan, la viande est l’objet d’une forte demande. Pour assurer sa disponibilité à des prix abordables, l’Algérie prévoit l’importation de viandes rouges et blanches dans le but d’assurer une stabilité des prix, selon le programme tracé par ce ministère.
Concernant la viande blanche, la survenue du mois de jeûne durant l’hiver est propice à l’élevage avicole. En été, les fortes chaleurs poussent de nombreux éleveurs à arrêter leur activité pour la reprendre seulement fin septembre.
A deux mois du début du Ramadan, en cas de disponibilité en poussins et en aliment de volailles, les éleveurs devraient avoir tout le loisir pour remplir leurs poulaillers. D’autant plus que la durée d’élevage de 56 jours des poulets coïncide avec le pic de consommation à venir.
Reste la question du prix de l’aliment à base de maïs et de tourteau de soja. Des produits importés et dont le prix a considérablement augmenté. En 3 ans le prix du quintal de tourteau de soja est passé de 5.000 à 12.000 DA, quant à celui du maïs il est passé de 3.000 à 5.500 DA. Pour les éleveurs, le poste aliment pour volaille constitue la charge la plus importante.
A cette hausse des prix mondiaux est venue s’ajouter la concurrence exercée par l’utilisation nouvelle du maïs et de soja pour l’engraissement des veaux et des moutons.
En matière de viande rouge, la production locale se trouve dans une situation délicate. En cause, la sécheresse qui frappe l’Algérie et impacte l’élevage ovin en milieu steppique ainsi que l’élevage bovin viande qui pâtit de l’arrêt des importations d’animaux sur pied depuis la France pour des raisons sanitaires.
Une situation qui impacte durement les éleveurs spécialisés dans ce type d’élevage à l’image de l’exploitation Bouadis de Rouiba. Propriétaire d’un abattoir, cet éleveur a vu la chute spectaculaire du nombre de veaux abattus, celui-ci passant de 200 par jour à un par semaine.
Lors du mois de Ramadan 2024, la société publique Alviar a procédé à l’importation de moutons en provenance de Roumanie. Ils ont été dirigés vers les abattoirs du groupe, ce qui a permis de proposer de la viande au prix réglementé de 1.900 DA le kilo contre 2.800 dinars pour la viande ovine locale.
Ces dernières années, les importations de bovins depuis le Mali et le Niger se développent à travers les opérations de troc : dattes sèches algériennes contre animaux. Il s’agit d’animaux maigres dont le rendement en viande des carcasses est mince. Aussi, des importateurs de Tamanrasset demandent l’autorisation de les engraisser avant de les conduire à l’abattoir.
Tant pour les moutons que pour les bovins, la tension sur l’aliment concentré reste forte. L’embellie pourrait provenir des industries agro-alimentaires.
En mars, le responsable de Kotama Agrifood, Abdelali Ferhati a déclaré au média La Patrie News que le complexe de production d’huile de table de Taher (Jijel) a une capacité de trituration de 5.000 à 6.000 tonnes par jour de graines oléagineuses.
Cette activité produit également du « tourteau pour l’alimentation du bétail, soit près de 1 650 000 tonnes/an ». Des travaux universitaires montrent qu’il est possible de valoriser ces sous-produits.
Une laiterie géante de Giplait à Alger
Le 21 décembre dernier à Batna, Samah Lahlouh, la directrice générale dui groupe laitier public Giplait a présenté un projet ambitieux visant à répondre à la demande des consommateurs notamment pendant le Ramadan.
Dès le premier trimestre 2025, ce groupe public devrait mettre en place une plateforme numérique visant à mettre en réseau ses 15 unités de production de lait réparties à travers tout le territoire national.
Le but est de veiller en direct sur l’état des stocks, la production et la distribution de lait. Il devrait être ainsi possible à Giplait d’ajuster immédiatement sa production en fonction de la demande et en particulier durant le Ramadan.
Une nouvelle laiterie devrait ouvrir à Rouiba avant cette période de forte demande en produits laitiers. A raison d’une production quotidienne de plus d’un million de litres de lait, cette laiterie devrait permettre à ce groupe une capacité de production de 5,2 millions de litres et de couvrir plus de 50 % du marché en lait pasteurisé.
Pour leur part, les laiteries privées Soummam et Hodna ont bénéficié de concessions agricoles de plusieurs milliers d’hectares dans la wilaya de Ouargla pour la production de fourrages.
Plan contre la spéculation
Ces jours-ci, à l’occasion d’une émission d’El Bilad TV, Hadj Djaâlali le président de la Chambre d’agriculture d’Aïn Defla faisait remarquer les progrès enregistrés ces dernières années par le secteur agricole : excédents de tomate industrielle ainsi que d’oignons et large disponibilité concernant les clémentines et le raisin.
Des progrès certes inégaux selon les filières considérées ce qui souligne des réserves de productivité.
Un autre aspect du programme Ramadan 2025 concerne le risque de spéculation. A cet égard, lors de son intervention, le ministre a été extrêmement clair en indiquant que toute volonté de spéculation pendant le mois de Ramadan ne pourrait être « qu’une tentative désespérée, compte tenu des mesures proactives visant à fournir des biens sur le marché national de manière suffisante et plus importante que l’année dernière ».