Le président français Emmanuel Macron a tenu, jeudi 30 septembre, des propos sur le système algérien et la colonisation qui ont plongé les relations entre les deux pays dans une crise d’une ampleur inédite.
Dans leur réaction aux propos de Macron, qui ont été rapportés par Le Monde hier samedi, les autorités algériennes et en réponse à ce qui s’apparente à un révisionnisme concernant le dossier mémorial, la présidence de la République a insisté sur les victimes de la colonisation française.
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Dans le communiqué de la présidence de la République, diffusé samedi soir, un chiffre officiel est avancé pour la première fois concernant le total des victimes causées par la colonisation française en Algérie, de 1830 à 1962.
« Les propos en question (du président Macron) portent une atteinte intolérable à la mémoire des 5.630.000 valeureux martyrs qui ont sacrifié leurs vies dans leur résistance héroïque à l’invasion coloniale française ainsi que dans la Glorieuse Révolution de libération nationale », lit-on dans le communiqué.
La présidence algérienne a ajouté que « les crimes de la France coloniale en Algérie sont innombrables et répondent aux définitions les plus exigeantes du génocide contre l’humanité. »
« Ces crimes qui ne sont pas prescriptibles, ne sauraient faire l’objet d’une manipulation des faits et d’interprétations atténuantes », a complété la présidence de la République.
« Ces crimes ne sont pas prescriptibles »
Officiellement, la France a donc tué 5.630.000 algériens en 132 ans d’occupation. Jusque-là, seul le bilan de la guerre de Libération nationale (1954-1962) était avancé avec précision du côté algérien, soit 1,5 million de martyrs. Un chiffre jamais reconnu par la France officielle pour laquelle la guerre, qui a duré sept ans et demi, a causé la mort de 250.000 morts algériens, dont 140 000 combattants de l’ALN, 26 000 soldats français et 10 000 civils européens.
Pendant la période allant de 1830 au début du 20e siècle, il y a eu plusieurs résistances populaires et une répression féroce suivait souvent les défaites algériennes, avec des exécutions sommaires, des déportations et des enfumades notamment.
L’évaluation de l’ensemble des pertes n’est pas facile à effectuer plus d’un siècle après les faits en l’absence d’archives, toutes emportées par les français à leur départ en 1962.
En janvier dernier, suite à la publication du rapport de commandé par Macron à l’historien Benjamin Stora sur la mémoire de la colonisation, Abderrahmane Hadj Nacer, écrivain et ancien gouverneur de la Banque d’Algérie, estimait dans un entretien paru sur TSA que « s’il n’y avait pas eu les génocides d’Algériens, la population algérienne serait (aujourd’hui) de l’ordre de 80 millions d’habitants ».
Il faudrait, selon lui, « des commissions composées de spécialistes très différents, notamment des anthropologues, des ethnologues, des sociologues, des démographes, des économistes, des statisticiens, des historiens », pour se pencher sur l’histoire coloniale.