Beaucoup de retombées sont redoutées après la victoire de l’extrême-droite aux élections législatives en Italie.
Sur de nombreux dossiers, notamment celui des migrants, la coalition gagnante se démarque nettement de la classe politique traditionnelle, de gauche ou de droite, en Italie.
Dimanche 25 septembre, les Italiens, appelés aux urnes, ont fait de Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni la première force politique du pays avec environ le quart des voix.
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La coalition formée avec La Ligue du Nord (extrême-droite) et Forza Italia (conservateur) a obtenu près de la moitié des suffrages (jusqu’à 47 %) et est assurée de la majorité absolue tant à la chambre des députés qu’au Sénat.
Il est presque une certitude que l’Italie aura à partir du mois prochain un gouvernement d’extrême-droite, très probablement dirigé par Giorgia Meloni.
La première grosse retombée à laquelle s’attendent tous les observateurs, c’est évidemment une nouvelle politique migratoire pour l’Italie, qui constitue avec la Grèce et l’Espagne l’une des principales portes d’entrée des migrants en Europe par la Méditerranée.
Le programme de la coalition promet le blocage en mer des bateaux de migrants et ceux des ONG qui leur portent secours, et ambitionne d’ouvrir des centres de rétention dans les pays d’Afrique du Nord (Algérie, Maroc et Tunisie) où seront traitées les demandes d’asile.
Mais l’Algérie a toujours refusé l’ouverture sur son territoire de ce genre de centres ou de faire le gendarme de l’Europe en matière de lutte contre l’émigration clandestine.
Matteo Salvini, leader de la Ligue du Nord, avait tenté sans succès d’imposer un blocus en Méditerranée lorsqu’il était ministre de l’Intérieur en 2018. Mais sous son mandat, les arrivées des migrants vers la France ont nettement baissé, souligne Laurent Mérengone, conseiller régional de la région Sud Paca (France), qui applaudit d’ailleurs les résultats des élections de dimanche.
Si les trois leaders de la coalition ne divergent pas sur le traitement à réserver au dossier des migrants, Giorgia Meloni, la probable future présidente du conseil italien, se distingue par un discours ouvertement identitaire et anti-musulman pas différent de celui développé par Eric Zemmour en France. Celui-ci brandit « le grand remplacement », elle « la menace civilisationnelle ».
Quelques-unes de ses déclarations sont sans équivoque. « Oui aux valeurs universelles de la Croix, non à la violence islamiste », « si vous vous sentez offensés par le crucifix, ce n’est pas ici que vous devez vivre », ou encore « nous n’avons aucune intention de devenir un continent musulman ».
Quel avenir pour l’excellente relation avec Alger ?
Face à un gouvernement prônant un tel discours, qu’elle sera l’attitude des États du Maghreb, notamment l’Algérie qui a toujours entretenu une relation excellente avec l’Italie ?
Une relation qui s’est davantage raffermie depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine et la crise énergétique mondiale. En avril, les deux pays ont signé un accord pour augmenter les livraisons de gaz à l’Italie via le gazoduc Transmed, faisant de l’Algérie le principal fournisseur de ce pays.
Un autre accord de 4 milliards de dollars a été signé en juillet entre Sonatrach et des firmes occidentales dont le géant italien Eni pour le développement d’un champ destiné à augmenter davantage les flux vers l’Italie.
À cette occasion, Mario Draghi, alors chef du gouvernement italien s’est déplacé à Alger pour la seconde fois en trois mois, une visite qualifiée par le président Abdelmadjid Tebboune de « pas de plus vers l’établissement de relations stratégiques ».
L’avenir de cette forte coopération dépendra évidemment de ce que feront concrètement les futurs nouveaux dirigeants italiens. On sait juste que du côté de l’Algérie, le respect des engagements contractuels est une constante, comme elle l’a montré pendant la crise avec l’Espagne.
En outre, rien dans les déclarations de Giorgia Meloni ou de ses deux alliés ne permet de soupçonner une volonté de revoir la relation avec Alger et encore moins la coopération énergétique, ce qui du reste serait insensé, sachant que l’Algérie fournit à l’Italie 36 % de son énergie.
Pendant la campagne électorale pour les législatives italiennes, où l’énergie a été un thème central, Meloni a suggéré de puiser du gaz dans la mer Adriatique, mais les spécialistes lui ont rétorqué que les réserves y sont très faibles, soit 15 mois à peine de consommation. Elle a aussi proposé la réalisation d’une grande station de regazéification en Toscane, un projet contesté localement.
Début septembre, une députée européenne de la Ligue du Nord a fustigé les dirigeants italiens qui n’ont pas mené à terme le projet du second gazoduc entre l’Algérie et l’Italie, le Galsi.
Dans la foulée, le président du Conseil de l’Europe, Charles Michel, n’a pas exclu, à l’issue d’une visite à Alger, la réalisation d’un deuxième gazoduc entre l’Algérie et Italie, sans préciser s’il s’agit d’un nouveau projet ou de la relance du Galsi.