Société

Visas : les Algériens durement touchés par les restrictions

Les Algériens demandeurs de visas s’en doutaient déjà. Leurs suspicions ont été officiellement confirmées par le ministère de l’Intérieur français. 297 104 visas ont en effet été accordés par la France aux ressortissants algériens durant l’année 2018. Avec 413 976 visas délivrés en 2017, les autorités françaises ont ainsi accordé 28,23% de visas en moins aux Algériens.

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Les responsables français commençaient depuis quelques mois déjà à préparer le terrain en vue de cette éventuelle annonce. Le consul général de France en Algérie, Marc Sédille, anticipait dès le mois de novembre dernier : « La combinaison de l’impact de la transition vers VFS Global et les effets du contrôle renforcé sur la délivrance des visas » aurait une « incidence » sur le nombre de visas délivrés. La chute semble cependant trop importante pour être expliquée par ces facteurs.

Choisi en décembre 2017 pour gérer les dépôts de demande à Alger, VFS a lancé ses opérations en avril 2018. Selon le consul, la période de transition a mené à l’arrêt de la réception des dossiers au consulat français pendant trois semaines. Quand bien même ceci aurait pu avoir une incidence sur le nombre de visa délivrés, la baisse de 100 000 visas ne pourrait être raisonnablement expliquée par cette période de trois semaines d’arrêt.

L’autre explication donnée concerne « le contrôle renforcé sur la délivrance des visas », une notion laissée volontairement vague mais suffisante pour permettre d’expliquer une chute de près de 30% des visas accordés. Néanmoins, la logique voudrait que le renforcement du contrôle sur la délivrance des visas concerne les ressortissants de tous les pays effectuant une demande de visa pour la France.

Il n’en est rien, et les chiffres le prouvent. Huit des dix nationalités à qui ont été délivrés le plus grand nombre de visas ont vu ce nombre augmenter entre 2017 et 2018. Le Maroc est passé de 323.670 visas en 2017 à 334.016 en 2018, la Tunisie de 136 663 à 154 011, la Russie de 262.543 à 372.541. Même la Chine première du classement a vu le nombre passer de près de 850 000 à 875.994 visas délivrés.

Seulement deux de ces dix pays ont enregistré une baisse : la Turquie et l’Algérie. La Turquie a enregistré une baisse marginale par rapport à l’Algérie, passant de 134.059 en 2017 à 125.290 visas délivrés en 2018, soit environ 7%. Bien loin de la baisse de presque 30% enregistrée sur les visas délivrés aux Algériens.

Pour se justifier, la France pourrait expliquer que la nature des visas accordés a changé, en affirmant par exemple que les durées des visas accordés sont devenues plus longues nécessitant la délivrance de moins de visas. L’argument ne serait toutefois pas recevable, les Algériens ayant plutôt constaté que la durée des visas accordés s’est nettement réduite. Les près de 300.000 visas accordés aux Algériens pourrait même ainsi se révéler trompeurs si ce sont dans plusieurs cas les mêmes personnes qui ont bénéficié de plusieurs visas de court séjour en France, réduisant d’autant plus le nombre d’Algériens bénéficiaires.

Au fond, d’aucuns pourraient avancer que la France n’a pas à se justifier sur le nombre de visas accordés aux ressortissants algériens. Que cela fait partie de son « domaine de souveraineté », pour reprendre le terme tant utilisé par leurs homologues algériens. Cela, dans l’absolu, est vrai.

Cependant, les symboles comptent, particulièrement lorsque la France ressasse comme élément de langage la notion de « partenariat d’exception » en parlant de la relation bilatérale. Lorsque l’Algérie est signalée comme étant le seul pays à voir le nombre de visas réduit de plus d’un quart, lorsque 110.000 visas de moins lui sont accordés en l’espace d’une année, lorsque la durée des visas devient de plus en plus courte, le message résonne bien plus fort que mille phrases prononcées.

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