Des milliers d’Algériens demeurent bloqués à l’étranger depuis le début de la pandémie de Covid-19. Aussi nombreuses soient-elles, les opérations de rapatriement d’Air Algérie n’ont pas permis de rapatrier tout le monde et il semble que le bout du tunnel pour ceux qui attendent toujours de retrouver leur foyer et leur famille est encore loin.
Il faut dire que c’est à une épreuve de yoyo démoralisante qu’ils sont soumis, en ce sens que chaque lueur d’espoir est vite suivie d’une nouvelle donne qui change tout.
Depuis début décembre, beaucoup ont entrevu la fin du calvaire avec le lancement d’une énième opération de rapatriement. Air Algérie avait annoncé des vols, 24 en tout, la majorité à partir des aéroports de France, pays qui compte le plus de ressortissants Algériens bloqués.
Les opérations devaient prendre fin le 19 décembre, mais la compagnie nationale apporte la bonne nouvelle en annonçant qu’elles vont se poursuivre.
« Le programme des vols de rapatriement sera maintenu jusqu’à la résorption de toutes les demandes des citoyens bloqués à l’étranger, inscrits auprès des représentations consulaires à l’étranger », avait indiqué Air Algérie dans un communiqué diffusé le 21 décembre.
Le 24, elle a rendu public le détail de ses vols programmés jusqu’au 31 janvier et l’espoir de ceux qui attendaient depuis 10 mois de rentrer chez eux s’en est trouvé renforcé.
Mais brusque retour à la case départ ce jeudi 7 janvier : les vols annoncés n’auront pas tous lieu. « Les autorités algériennes ont décidé d’aller plus loin qu’un simple report de la reprise des vols réguliers. Selon nos informations, l’opération de rapatriement en cours n’ira pas à son terme, prévu le 31 janvier prochain. Elle sera suspendue dès le 17 janvier », rapporte le site spécialisé visa-algerie. Ce qui signifie que les autorités ont renoncé à leur engagement de satisfaire « toutes les demandes ».
Nouvelle souche du Covid-19, trabendistes, opacité
Loin d’être un choix délibéré, la décision est dictée notamment par la dégradation de la situation sanitaire dans de nombreux pays européens et l’apparition d’une nouvelle souche du virus dont on ne connait pas encore grand-chose.
L’Algérie a connu une accalmie de la pandémie au milieu de l’été puis la situation s’est dégradée nettement au début de l’automne, avant de s’améliorer de nouveau depuis quelques semaines.
Le pays enregistre une moyenne quotidienne de moins de 300 nouvelles contaminations et les autorités politiques et sanitaires souhaitent maintenir la tendance.
Permettre le retour d’un coup de quelque 25 000 citoyens (c’est le nombre d’Algériens encore bloqués, selon le ministre de l’Intérieur Kamel Beldjoud), c’est prendre le risque de booster de nouveau les contaminations, au moment où il n’y a aucune garantie pour le lancement immédiat de la vaccination.
La précaution se comprend donc dans une certaine mesure, mais les milliers de ceux qui attendent en Europe et ailleurs dans des conditions plus que difficiles ne manqueront pas de rappeler aux autorités qu’elles ont le devoir de leur trouver une solution, comme elles l’avaient fait pour les 30 000 rapatriés entre mars et septembre et les 6 000 qui ont pu rentrer en décembre.
D’autant que l’argument sanitaire est battu en brèche par l’efficacité prouvée des compagnies aériennes et des aéroports à lutter contre la propagation de la pandémie de coronavirus.
Depuis la reprise partielle du trafic aérien partout dans le monde, aucun avion n’a été immobilisé ou aéroport mis en quarantaine, après la découverte de cas de Covid-19 parmi les passagers.
Les représentants de la communauté répètent pourtant que le risque d’un impact négatif d’un rapatriement massif sur la situation sanitaire n’est pas une fatalité, les concernés étant disposés à présenter des tests Covid et même éventuellement subir une période d’isolement une fois en Algérie.
Les Algériens bloqués à l’étranger et les membres de la diaspora qui souhaitent revenir ou venir en Algérie peuvent légitimement reprocher au gouvernement de n’avoir pris sérieusement les choses en main.
Car les griefs n’ont pas manqué pendant toute cette période, beaucoup de voix s’étaient élevées pour dénoncer des passe-droits et surtout une bureaucratie incompréhensible dans l’établissement des listes des prétendants au retour.
Que les accusations soient exagérées ou pas, on ne peut pas dire que les autorités ont géré au mieux la situation puisqu’il y a ce fait indéniable : près de la moitié de ceux qui se trouvaient en voyage au début de la pandémie n’ont pas pu regagner leur foyer dix mois après.
Il parait aussi que des trabendistes ont profité de l’opacité qui entoure l’établissement des listes des rapatriés pour faire des allers retours lucratifs entre l’Algérie et l’étranger, et revenir avec des cabas bien remplis de produits introuvables dans les supérettes des villes algériennes, en raison des restrictions sur les importations. C’est l’autre raison qui aurait poussé le gouvernement à revoir le programme des vols de rapatriement d’Air Algérie.